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Dupraz, don’t look back in Angers

Par Alexandre Pedro
Dupraz, don’t look back in Angers

Les mécréants peuvent se réjouir : Pascal Dupraz n’est plus l’entraîneur du TFC. La fin d’une histoire de presque deux ans où l’amour des premiers mois a viré à l’incompréhension. Mais pouvait-il en être autrement ? Autopsie d’une rupture.

Il a laissé le TFC dans l’état dans lequel il l’avait trouvé le 1er mars 2016 : relégable, triste à voir et avec la jeunesse pour excuse bien pratique. C’est bien connu, en football, la mémoire n’excède pas celle d’un poisson rouge, la reconnaissance qu’on croit éternelle se lézarde très vite. « Nous pouvons être des héros, mais juste pour un jour » , chantait Bowie. Pas plus. Pascal Dupraz a bien été le héros d’un club qui n’en compte pas tant que ça. Il a réveillé un mort, secoué un club « sympa » , mais endormi entre un président qui ne regarde plus l’enfant qu’il sauva de la noyade au début des années 2000 et son bras droit (Jean-François Soucasse) aussi difficile à trouver que Xavier Dupont de Ligonnès dans un monastère.

Au départ, il lui était demandé de terminer la saison avec dignité pour préparer la remontée, mais lui avait osé parler de maintien malgré dix points dans la vue sur le premier non-relégable. Dupraz a eu la chance des inconscients, qui se révèlent juste des audacieux, entre la faillite de Reims et « la patte gauche » de Bodiger. Dans un club trop raisonnable où le budget en équilibre à présenter à la DNCG servait de seul horizon, il a apporté un peu de déraison, quitte à forcer sur la mise en scène et les déclarations qui remontent en haut de Google Actualités.

Mais on fermait les yeux. Angers était devenu le totem d’immunité d’un technicien qui répétait son allégeance à son club, mais prenait toujours plus de place. Comme il a existé un PSG avant Zlatan, le TFC vivait avant les pulls du Savoyard. Même secondaire, une histoire se respecte, son public aussi. Quand les défaites sont arrivées, les dérivatifs à la responsabilité de l’entraîneur sont apparus : les joueurs, les employés municipaux en charge de la pelouse, mais aussi ses supporters qui supportent mal et critiquent trop.

Comme il a existé un PSG avant Zlatan, le TFC vivait avant les pulls du Savoyard.

En décembre, quand il y avait déjà quelque chose de pourri au royaume de Savoie, les Indians Tolosa envoyaient une lettre ouverte qui ressemblait un peu à une demande de divorce. « Le personnage du bonhomme qui a une paire de couilles et fout les pieds sur la table, la chicha au bec, nous a fait marrer au début, mais à la longue, on a commencé à se demander où tu voulais en venir. »

Prêt à « aller au casse-pipe pour répondre aux insultes »

Le savait-il lui-même ? Il déteste l’étiquette, mais elle lui va plutôt bien : Dupraz est un entraîneur de mission. Un corsaire des montagnes qui ne sait pas comment gérer les temps de paix. Alors il fallait trouver une nouvelle conquête après la remontada pour fédérer les hommes et empêcher la narcolepsie de frapper de nouveau sur les rives de la Garonne. Et pourquoi pas de se rêver en Leicester ? Un club d’une ville de rugby, qui termine 17e, puis danse sur les gros de son championnat avec un jeu direct, le portrait-robot collait bien avec celui du TFC. « Leicester, Leicester, on fera comme eux, on fera même mieux » , s’autorisait-on à chanter au Stadium après une victoire estivale face au PSG. Et puis imperceptiblement, le charme s’étiola. Cette équipe ne progressait plus, son entraîneur ne bonifiait pas son effectif, la patte gauche de Bodiger boitait en réserve et le ventre mou redevint l’habitat naturel des Violets.

Avec le retour du spectre de la relégation, Pascal Dupraz ressortait les tenues camouflage (stage avec le GIGN, nostalgie de l’époque de son grand-père quand « les hommes s’envoyaient des grands coups de poing dans la gueule » ou joueur écarté pour un retard de deux minutes). Début janvier, il parlait Top 10, finale de coupe ou menaçait de monter en tribunes « aller au casse-pipe pour répondre aux insultes » . À vrai dire, il était lourd. À force de trop écouter Pascal Dupraz, on avait fini par ne plus regarder son équipe : une formation sans idée, ni onze de départ établi ou envie de se défoncer les uns pour les autres. Le TFC appartient à cette quinzaine de formations à jouer à touche-touche dans cet autre championnat où il se pensait à l’abri avec ses quelques noms (Imbula, Delort, Jean, Toivonen et d’autres) qui évoquent pour les moins attentifs le souvenir de footballeurs au-dessus de la moyenne.

Dupraz a continué à raconter des histoires, user des mêmes ressorts, critiquer l’arbitrage alors que son club survole le classement des penaltys obtenus (mais pas toujours transformés) ou oser le tweet-clash avec Jean-Michel Aulas. Persuadé de finir par tomber sur un trèfle à quatre feuilles par un magnétisme légué par sa mère, il a juste été rattrapé par ses insuffisances, mais aussi celles d’un club qu’il a sans doute aimé et qui l’a aimé en retour. Mais il était peut-être temps de rentrer d’Angers.

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