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Dopage : un étouffement, et après ?

Par Maxime Brigand
Dopage : un étouffement, et après ?

Cinq mois après les colères répétées de Stanislav Cherchesov lors du Mondial au sujet des doutes sur les tests de dopage de la sélection russe, des documents extraits des Football Leaks démontrent comment la FIFA aurait tenté d'étouffer le travail de Richard McLaren, l'homme qui a révélé le dopage d'État russe en 2016. Et si le temps des actions arrivait ?

Une histoire d’amour d’été, d’abord. Au début du mois de juillet, Stanislav Cherchesov, sélectionneur d’une Russie qui venait alors de tomber en quarts de finale de sa Coupe du monde au bout d’une séance de tirs au but suffocante face à la Croatie, a accepté de rencontrer des journalistes du Spiegel. Puis, en plein entretien, l’homme à la moustache morse a claqué la porte sur ces mots : « Interrogez-moi sur des choses qui sont factuellement prouvées, et je vous répondrai.(…)Ce que vous pensez n’intéresse pas la Russie. » Trois semaines plus tôt, Cherchesov avait déjà laissé éclater sa colère en conférence de presse, quelques minutes après un succès de la Sbornaya face à l’Égypte. La question : « En Allemagne, certaines enquêtes évoquent des doutes sur les tests de dopage de la sélection. Que pouvez-vous dire là-dessus ? » Et sa réponse : « Soyez respectueux avec les joueurs russes… C’est une Coupe du monde, on parle de foot. Je ne suis pas là pour répondre à des supputations farfelues. »

Des supputations qui avaient malgré tout poussé le médecin de la sélection russe, Eduard Bezuglov, à filer défendre publiquement des footballeurs considérés à ses yeux comme « les plus propres du monde » . Bezuglov qui avait même tiré dans tous les sens, un matin, au centre d’entraînement de la bande à Cherchesov : « Nous aimerions également savoir combien de fois l’équipe d’Angleterre a été contrôlée. Mais nous ne le demanderions pas à la FIFA puisqu’elle ne répond jamais à ce genre de requêtes. Avec seulement deux rassemblements depuis le début de l’année, entre les tests de la FIFA, de l’UEFA et de Rusada (l’agence antidopage russe au cœur du scandale de dopage organisé dénoncé par le rapport McLaren, N.D.L.R.), nos joueurs ont été contrôlés plus de 300 fois. Je vous parie une bouteille de lait, allégé bien sûr, que c’est plus de deux fois le nombre de tests pour les joueurs anglais. » Circulez, rien à voir.

Câlins et liste

Puis, une nouvelle lame est tombée vendredi, au milieu des Football Leaks et à côté d’une histoire de contrôle positif à la dexaméthanose, un corticoïde, impliquant Sergio Ramos. À savoir : le procureur interne de la FIFA – Claudia María Rojas, une proche de Gianni Infantino, recommandée par le président de la Fédération colombienne au printemps 2017 pour remplacer Cornel Borbély, chargé à l’époque de la chambre d’instruction du comité d’éthique de l’institution – aurait bien empêché toute enquête sur le dopage russe alors qu’Infantino a reçu il y a un an une liste de onze joueurs suspectés de dopage. Pourquoi ? Comment ? Simplement, en réalité : si la FIFA assurait le 22 mai dernier qu’ « aucun élément » permettant d’établir « une violation des règles antidopage » n’avait été trouvé, il n’en était rien.

Car il n’y aurait, en réalité, jamais eu de réelles investigations poussées, Claudia María Rojas ayant empêché le juriste canadien Richard McLaren, homme qui a publié en 2016 avec l’AMA (l’agence mondiale antidopage) grâce à des documents transmis par l’ancien patron des laboratoires antidopage russes, Grigory Rodchenkov, un rapport concluant au dopage de plus de 1000 athlètes russes dans différentes disciplines. Les documents tirés des Football Leaks permettent ainsi de prouver comment Claudia María Rojas a laissé traîner l’affaire pour ne pas perturber le déroulé du Mondial 2018, mais aussi pour ne pas froisser la Russie, Gazprom étant un gros pourvoyeur de fonds de la FIFA.

« La FIFA n’a jamais voulu d’enquête »

L’histoire raconte alors que la FIFA a pris contact avec Richard McLaren lors de l’été 2016 pour obtenir des informations concernant d’éventuels cas de dopage de footballeurs russes et l’implication dans ce système généralisé de Vitaly Mutko, membre du comité exécutif de la FIFA et président du comité d’organisation de la Coupe du monde. Derrière ? Rien, ou pas grand-chose, l’instance internationale ayant finalement décidé de se passer des services de McLaren et de faire sa petite enquête elle-même, alors qu’elle avait reçu en décembre 2017 une liste de onze joueurs russes suspectés de dopage, dont Sergei Ignashevich et Mario Fernandes. « Avec le recul, je pense que la FIFA n’a jamais voulu d’enquête. Et finalement, c’est ce qu’ils ont obtenu » , explique aujourd’hui McLaren à l’EIC, là où la FIFA, elle, se défend en affirmant que le « montant de l’investissement nécessaire pour s’attacher les services de McLaren » était trop important.

Forcément, ces nouvelles révélations interrogent, notamment lorsqu’on sait que la FIFA avait refusé de publier durant le Mondial le nombre de contrôles antidopage réalisés auprès de l’équipe russe. Mais faut-il jouer les surpris ? Non, en aucun cas, l’idée désormais serait simplement de faire éclater la bulle de silence autour du dopage dans le foot : un « silence total » qui dérange, qui pose des questions et qui s’explique facilement par les enjeux économiques qui tournent autour du petit monde. Aujourd’hui, il n’y a plus de supputations, voilà des « choses qui sont factuellement prouvées » , ce que demandait Cherchesov : assez pour voir des actions ?

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