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  • Sélection non officielle de Bretagne

Domenech, la Bretagne, ça le gagne

Par Aymeric Le Gall
Domenech, la Bretagne, ça le gagne

Six ans après avoir mis un terme à sa carrière de sélectionneur de l'équipe de France, Raymond Domenech amorce son retour sur un banc de touche. Et c'est en tant que coach de la sélection non officielle de Bretagne que l'ex-patron des Bleus a choisi de faire son come-back. À l'approche de sa première conférence de presse, le moment est venu de chercher à comprendre le pourquoi du comment.

Il y avait bien longtemps qu’il avait été remisé au placard, bien longtemps aussi qu’il s’était fait une raison. Déposé dans la penderie un soir de juin 2010 comme on bazarde un ensemble passé de mode, le costume de sélectionneur de Raymond Domenech pensait avoir fait son temps. Mais la mode est cyclique et, dans quelques jours, le costard aura droit à une seconde jeunesse. En effet, comme annoncé officiellement il y a deux semaines, l’ex-sélectionneur de l’équipe de France va reprendre du service à la tête de la sélection de Bretagne.

Un retour sur le banc d’une sélection qui, si tout se passe comme prévu, devrait devenir effectif le 22 mai prochain, soit presque 6 ans jour pour jour après le fiasco de Knysna et une ultime défaite des Bleus au Mondial 2010 face à l’Afrique du Sud. Alors, certes, cette nomination à la tête de la sélection – non officielle – bretonne n’a rien de comparable avec le clinquant de son ancien job, il n’empêche, revoir Domenech sur un banc de touche relève tout de même du petit événement historique dans l’Hexagone.

C’est quoi les bayes Raymond ?

Ce retour par la petite porte aurait d’ailleurs pu se faire plus tôt.

Les premiers contacts avec Raymond Domenech remontent à 2014.

Il y a deux ans déjà, les dirigeants de cette sélection de Bretagne avaient évoqué l’idée avec l’ancien patron des Bleus. « Les premiers contacts avec Raymond Domenech remontent à 2014, confirme Fañch Gaume, l’actuel secrétaire général de la team BZH. À l’époque, on avait voulu organiser un match à visée humanitaire, à Vannes, contre la Centrafrique. Il nous avait donné son accord, mais la rencontre n’avait finalement pas eu lieu. » Ce ne fut que partie remise. Si ce come-back original en surprendra plus d’un, il n’est pas tout à fait dénué de sens. Déjà, cela devrait lui permettre de remettre le pied à l’étrier après bientôt six ans de sevrage. Mais en douceur, sans prendre le risque de s’exposer à la pression qu’aurait engendrée une prise de fonction à la tête d’une équipe ou sélection officielle. En prenant en main la Bretagne, Domenech s’assure un retour sur les pelouses pour le moins pépère. La sélection bretonne n’est pas reconnue par la FIFA, et les seuls matchs qu’elle dispute le sont au nom de la bonne cause et de la bonne humeur. « Il y a toujours une dimension humanitaire autour des rencontres de l’équipe de Bretagne, et l’engagement de Raymond Domenech se fait vraiment par rapport à tout ça » , tient d’emblée à préciser Fañch Gaume.

Interrogé récemment dansOuest-France sur les raisons de cette prise de fonctions, le principal intéressé parle de « plaisir avant tout » .

Quand je viens en Bretagne, je ne vois que le beau temps, que les belles choses. Même quand il pleut, c’est beau. J’adore la tempête, la mer qui bouge, ce côté sauvage.

« Il y a différentes choses qui le motivent et notamment l’aspect« plaisir de jouer », prolonge Gaume. C’est vraiment quelque chose de fondamental pour nous, et on le ressent aussi au niveau des joueurs, au niveau de l’ambiance. » Il y aura toujours des détracteurs pour pointer du doigt ce drôle de choix et douter du bien-fondé de sa décision, mais s’il y a bien quelque chose qu’on ne peut reprocher à Domenech, c’est l’amour sincère qu’il porte à la Bretagne. « J’adore cette région, clamait-il dans le plus grand canard de l’Ouest, non sans oublier d’enfiler ses gros sabots au moment de parler météo. Quand je viens en Bretagne, je ne vois que le beau temps, que les belles choses. Même quand il pleut, c’est beau. J’adore la tempête, la mer qui bouge, ce côté sauvage. » Propriétaire d’une maison à Étables-sur-Mer dans les Côtes d’Armor, l’ancien n°1 tricolore passe souvent ses week-ends sur la côte de Goëlo. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir sa tignasse grise peupler les gradins du Roudourou, le stade de l’En Avant de Guingamp, situé à quelques kilomètres de chez lui. Dès lors, cette nomination ne semble pas si farfelue que ça. « C’est une officialisation de mes racines, de celles que j’ai plantées moi-même » , allait même jusqu’à clamer le meilleur pote de Nicolas Anelka.

Bénévolat, passion et coup de projo’

En choisissant de revêtir de nouveau le costume de sélectionneur, Domenech a accepté le deal en vigueur dans cette équipe de Bretagne : pas question de parler d’argent, seul le bénévolat prime. Fañch Gaume explique :

Il faut perpétuer cet esprit de régionalisation, confirmer son identité, c’est dire qu’on a une culture, une langue, des racines. Et le football est une manière sympa, simple, de faire vivre ça.

« Il n’y a pas de rémunération, on n’aurait pas les moyens de faire ça de toute manière. Les seuls moyens dont on dispose sont utilisés pour simplement exister. Ici, on vient tous pour donner et non pour prendre. Que ce soient les joueurs, le coach ou les membres du bureau, tous savent pourquoi ils sont là. Ils voient l’écusson, l’hermine sur le maillot et ils veulent simplement la représenter dignement. » Ce particularisme breton, cette identité forte, Domenech les a parfaitement intégrés : « Je pense qu’il faut perpétuer cet esprit de régionalisation, mais sans toutes les revendications nationalistes. Confirmer son identité, c’est dire qu’on a une culture, une langue, des racines. Et le football est une manière sympa, simple, de faire vivre ça. » Au-delà de la symbolique de voir la sélection bretonne jouer quelques matchs par-ci par-là, les ambitions sont bien réelles dans l’esprit des dirigeants. Pour le secrétaire général, la venue de Raymond Domenech ne doit pas simplement être un coup médiatique.

Mais que peut-il apporter réellement à cette équipe ?

Domenech, ce n’est pas n’importe qui, hein ! C’est un personnage médiatique et si ça peut donner un coup de projecteur sur la Bretagne, c’est très bien.

« Ça serait présomptueux de ma part de dire quoi que ce soit à ce sujet, répond Fañch. Raymond, c’est une expérience énorme, c’est une envie énorme, c’est un respect pour ce maillot et une volonté de faire du jeu. Son engagement est un engagement de passion. » Potentiellement sélectionnable avec la sélection BZH, Frédéric Sammaritano a pris la nouvelle avec beaucoup de plaisir. Après avoir exprimé sa joie et sa surprise sur son compte Twitter, le joueur dijonnais pousse la réflexion un peu plus loin : « Domenech, ce n’est pas n’importe qui, hein ! C’est une bonne chose pour cette équipe, c’est un personnage médiatique et si ça peut donner un coup de projecteur sur la Bretagne, c’est très bien. » Tonalité identique du côté de Gaël Danic : « C’est bien, ça donne une touche… pas forcément plus pro, mais disons que ça prouve que cette sélection n’est pas prise à la légère. Ça donne de la crédibilité. Que quelqu’un comme lui arrive, un ancien sélectionneur de l’équipe de France et finaliste du Mondial 2006, ce n’est pas anodin. Et puis il se sent proche de cette région, donc je suis tenté de dire que c’est la suite logique des choses ! »

Le Togo, 10 ans après 2006 ?

L’ancien boss de l’équipe de Bretagne, Claude Le Roy, semble pour sa part avoir un peu plus de mal à comprendre la décision du natif de Lyon. « J’aime bien Raymond, mais je pense que… c’est étonnant, quoi. Il y a quelques potes qui m’ont appelé en me disant « Mais qu’est-ce que c’est que ce cirque ? »

Il est possible qu’il y ait une équipe locale qui affronte la Bretagne, mais ça ne sera pas l’équipe du Togo à proprement parler.

Certains n’étaient pas très contents. Bon, moi, je m’en fous, sincèrement. » Tout récemment nommé à la tête des Éperviers togolais, Claude Le Roy pourrait pourtant être le premier adversaire de Domenech, même s’il faut encore évoquer cela au conditionnel. « C’est pas sûr, hein, tempère le « Sorcier Blanc ». Il faut arrêter avec ces effets d’annonce et dire les choses sérieusement. Pour le moment, il n’y a rien de fixé. Il est possible qu’il y ait une équipe locale qui affronte la Bretagne, mais ça ne sera pas l’équipe du Togo à proprement parler. Faut pas tout confondre. Si ça avait été un match en fin de course, après une CAN par exemple, pourquoi pas ? Mais là, c’est à quelques jours d’un match où l’on va jouer deux ans de la vie de tout un pays(le Togo va jouer sa qualification à la prochaine CAN au Liberia le 5 juin prochain, ndlr)… »

Fred Sammaritano avoue lui aussi être un peu dans le brouillard quant à la future tournée humanitaire des Bretons sur le sol africain : « On n’a quasiment eu aucune information par rapport à la préparation de la prochaine échéance qui, a priori, aura lieu en Afrique… Il doit y avoir pas mal de joueurs qui ont déjà planifié leurs vacances, on ne sait pas encore qui sera sélectionné, c’est un peu flou pour l’instant. » Raison de plus d’écouter attentivement la première conférence de presse de Raymond le Breton. Et de voir si son costume est toujours bien taillé.

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