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Daniela Pardo : « Retourne jouer avec tes poupées… »

Par Arthur Jeanne
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Le Chili dispute la première Coupe du monde de son histoire, à partir d'aujourd'hui face à la Suède (18h à Rennes), mais le chemin est encore long pour que le football féminin soit pleinement considéré à Santiago. Daniela Pardo (31 ans), milieu de la Roja, en sait quelque chose. Conversation avec une pionnière.

Quel est l’objectif du Chili pour son premier Mondial ?Nous nous préparons avec le but de gagner chaque match que nous disputerons. Si nous parvenons à passer la phase de poules, ça serait vraiment très grand pour nous en tant que sélection, mais aussi pour le football féminin au Chili. C’est ça l’objectif. Pouvoir rivaliser avec nos adversaires, avoir un rôle important. Et ensuite on verra ce qui arrivera. J’espère que nous obtiendrons des bons résultats, puisque quand le travail a été bien fait, l’idée est que tout ce processus aboutisse à quelque chose de bien.

Se qualifier à la Coupe du monde, c’était indispensable pour le développement du football féminin au Chili ?

Dans le football comme dans la vie, tout se mesure en matière de résultats, de classement et de trophées. Donc évidemment, le fait de se qualifier pour le Mondial, alors que la sélection masculine n’a pas pu aller en Russie, c’est important.

Oui, le Chili avait organisé le Mondial des moins de 20 ans en 2008. J’ai joué lors de cette compétition. Mais clairement se qualifier pour un Mondial en gagnant ce droit sur le terrain, en terminant second lors de la Copa América, c’est très important et très différent. Et cela donne de la force et de la légitimité pour que le football féminin se professionnalise et que les conditions s’améliorent. C’est le genre de succès qui te donne un vrai plus à ce niveau-là. Dans le football comme dans la vie, tout se mesure en matière de résultats, de classement et de trophées. Donc évidemment, le fait de se qualifier pour le Mondial, alors que la sélection masculine n’a pas pu aller en Russie, c’est important.

Ça a été positif pour vous que la sélection masculine n’aille pas en Russie ?Ça a été une douleur pour nous en tant qu’amoureuses du football, et de la Roja. Je l’ai encore en travers de la gorge. Mais en contraste avec cet échec, cela a mis en lumière notre qualification, ça lui a donné de la visibilité.

Tu disais que le Chili avait organisé en 2008 la Coupe du monde des -20 ans, mais depuis, le football féminin a été un peu abandonné au Chili…Ce Mondial a été important, cela a donné de la visibilité au fait que les filles jouent au football ici. Des stades ont été construits spécifiquement pour cela. Des infrastructures qui encore aujourd’hui sont parmi les meilleures du pays. Et cela grâce au football féminin. Et pourtant nous sommes ensuite tombées dans des années obscures. Il n’y a pas eu d’aspiration. La sélection a passé des années sans jouer de matchs officiels. Culturellement au Chili, c’est très compliqué de faire grandir quelque chose que les gens ne comprennent pas. Que les femmes jouent au football, c’était considéré comme bizarre, les gens se disaient : « Elles vont le faire un moment et puis oublier, retourner à leur réalité. » Le Chili est un pays très machiste, et c’est compliqué de dépasser cela. Mais c’est ce qu’on essaie de faire.

De manière personnelle, tu as été soutenue par tes proches quand tu as commencé à jouer ?Ma mère et ma grand-mère m’ont toujours soutenue. Je n’ai eu aucun problème. Mais certaines personnes de mon entourage ont été plus dures, plus agressives dans leurs mots. C’est toujours compliqué de casser les murs. Certaines personnes interdisaient à leurs fils de jouer avec moi. Quand tu es enfant, tu entends des « retourne jouer avec tes poupées, tu n’as rien à faire ici » . Les enfants n’ont pas de préjugés, c’étaient plus les parents qui posaient problème.

Le Chilien moyen a encore du mal à voir des femmes jouer au foot ?Je dirais que oui. Moins qu’avant. Mais souvent on entend encore des commentaires limites, des blagues de mauvais goût. Certains en revanche appuient et se rendent compte qu’on donne tout pour réussir, qu’on travaille, qu’on étudie, qu’on fait des sacrifices. Nous générons une vraie adhésion par l’esprit guerrier, humble et travailleur de cette sélection qui représente l’idiosyncrasie chilienne. Et le Chilien se sent représenté par le fait de ramer à contre-courant, de venir de loin.

Tu travailles comme graphiste à côté, c’est compliqué de vivre du football ?Oui, je viens de terminer mon stage de fin d’études. Toutes mes années d’études, j’ai étudié, travaillé et joué au football. C’est exigeant. Si tu demandes aux joueuses ici, c’est le modèle le plus fréquent, elles travaillent, étudient, jouent pour leur université et pour un club. C’est une passion en réalité. Tu le fais sans rien recevoir en retour. Aujourd’hui, nous avons obtenu quelque chose d’important, donc il est temps d’exiger quelque chose, des conditions meilleures.

Justement, ton club, Santiago Morning, est précurseur en la matière.Oui, et j’en suis très fière. Nous sommes championnes en titre, et le « Chago » Morning est le premier club à avoir engagé cinq joueuses professionnelles. « Professionnelles » entre guillemets. Il ne faut pas non plus se mentir, c’est difficile de vivre avec ce statut de joueuse professionnelle, tu ne gagnes pas beaucoup d’argent. Mais si on exclut le facteur financier, avoir le statut de professionnelle avec le soutien du club, c’est un pas important. Pour que d’autres clubs suivent cet exemple notamment. Si personne ne débute, personne ne suivra.

Santiago Morning est aussi progressiste sur d’autres sujets.Oui, sur notre maillot figure par exemple un drapeau arc-en-ciel. C’est une idée qu’a eue notre entraîneur, et comme je suis graphiste, j’ai designé ce maillot. Nous croyons à l’inclusion et la différence. Au Chili, c’est un sujet essentiel. Il faut des gens pour rendre visible ces sujets que personne ne souhaite voir.

La CONMEBOL a programmé la finale de la Copa América le même jour que la finale de la Coupe du monde féminine. C’est désespérant ?

J’ai un rêve : nous en finale du Mondial et les mecs en finale de la Copa América, ça serait la journée idéale pour le pays et l’occasion parfaite de faire un long asado devant les matchs.

La CONMEBOL… (Soupir.) C’est une absurdité, je ne sais pas qui est derrière cette décision, mais c’est un détail qui prouve qu’ils ne veulent pas qu’on ait de la visibilité, qu’en somme, on reste un accompagnement, un petit lever de rideau. La compétition masculine est toujours placée devant nous. Ceci dit, j’espère que les Chiliens regarderont nos matchs. J’ai même un rêve : nous en finale du Mondial et les mecs en finale de la Copa América, ça serait la journée idéale pour le pays et l’occasion parfaite de faire un long asado devant les matchs.

Comment tu définirais le style de jeu de la sélection ?Le style de la sélection est clair et marqué, dans le sens où nous allons toujours de l’avant avec un pressing haut et nous ne sacrifions rien à ce style de jeu. Quel que soit l’adversaire, l’idée directrice n’évolue pas. Nous ne changeons pas et nous conservons notre mentalité offensive en toute circonstance. Peut-être parce que nous avons grandi en regardant les matchs du Chili de Bielsa.

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210325 Alexander Isak of Sweden and Khvicha Kvaratskhelia of Georgia during the FIFA World Cup Qualifier football match between Sweden and Georgia on March 25, 2021 in Stockholm. Photo: Johanna Lundberg / BILDBYRÅN / kod JL / JM0097 Photo by Icon Sport
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