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  • Ligue 1
  • J29
  • Lille-Montpellier (1-1)

Coups et blessures

Par Eric Carpentier
Coups et blessures

Ennuyeuse à mourir, la soirée de Ligue 1 a connu un twist inattendu du côté de Lille. Alors qu'ils s'apprêtaient à rentrer tranquillement aux vestiaires après un nul plutôt intéressant face à un Montpellier qui se bat pour la cinquième place, les joueurs ont vu débarquer des supporters remontés comme des coucous. Et, pour une partie d'entre eux, violents. Mais comment en est-on arrivé là ?

Il faut croire que la soirée était placée sous le signe du kickqui tape fort. En première partie, c’était les trente ans de Suprême NTM chauffés par la Fédération française de bagarre à Paris. Deux heures plus tard et deux cents kilomètres au nord, les oreilles des mères sifflaient toujours, mais une bonne partie des acteurs du shown’était pas née à l’époque de Rapattitude.

Et surtout, le spectacle était nettement plus triste que sur la scène de Bercy. Car voir des supporters frapper les joueurs de leur propre club est bien entendu d’une infinie tristesse. D’autant qu’elle est révélatrice d’un malaise plus profond.

« Comment en est-on arrivé là ? »

Évacuons d’entrée une lapalissade : s’en prendre physiquement à ses joueurs est une connerie absolue. Du dernier match de District à la finale de la Coupe du monde, la violence est une défaite de l’intelligence, le degré zéro de la réflexion et la meilleure façon de ne pas gagner. On ne peut que condamner les coups lâchés sur, entre autres, Nicolas Pépé, bien au-delà du fait que l’Ivoirien porte le club sur ses épaules depuis le début de l’année. Comme on ne peut que regretter le menaçant, en plus de n’être pas très recherché, slogan « Si on descend, on vous descend » scandé après que l’ensemble des joueurs a regagné les vestiaires. Ce constat posé, on reste en droit de s’interroger sur le contexte général ayant pu conduire à un envahissement de terrain à l’issue d’un nul pas si honteux (Montpellier était cinquième au coup d’envoi), et alors que la quatorzième place ne reste qu’à quatre points, à neuf journées de la fin.

« Comment en est-on arrivé là ? » questionnait après la rencontre Vincent Enyeama, dernier pilier du loft bâti par Marcelo Bielsa – à moins qu’il ne s’agisse d’une fosse. Parmi les pistes, il y en a une évidente, mais trop souvent oubliée : un club de foot n’est pas un business comme un autre, et ne se limite pas à une équipe de joueurs passant par là. C’est une histoire, un ancrage, une identité et une fierté. Pour certains supporters – souvent les mêmes à qui on interdit le nom à la première infraction, mais qui seront encore présents quand tout le monde sera parti si les choses tournent mal –, c’est une vie dédiée sans contrepartie tangible. Et ceux-là ont mal au cœur en voyant leur club se transformer en jouet prisonnier des mains (ou des pieds) de parachutés ne lui portant de l’affection que dans la mesure où elle s’aligne sur leurs propres intérêts. Le genre de douleur qui distingue un coup d’une blessure. Il ne s’agit en aucun cas de justifier les débordements violents : la passion n’est plus inscrite comme circonstance atténuante dans le code pénal depuis 1975.

Rio ne répond plus

Reste que cet envahissement, c’est une assiette cassée dans un couple qui se délite, un épiphénomène exprimant la peur et l’absence. La peur du vide en cas de séparation (une relégation serait potentiellement fatale et pourrait provoquer un destin à la Bastia), l’absence de tout lien auquel s’accrocher pour atténuer le vertige… Parce qu’aujourd’hui, le LOSC est devenu méconnaissable. Même pour ses amoureux les plus fidèles. La solvabilité, voire l’honnêteté, du propriétaire est questionnée à chaque examen de ses montages financiers, le projet de jeu vendu en grande pompe s’est écrasé au premier trou d’air et, conséquence, le renouvellement massif du crewne trouve plus aucune raison d’être. Résultat, alors que toutes les parties clamaient « l’union sacrée » avant ce match, les velléités ont fait long feu à la première petite déception. Dans l’excès et sans dirigeants ni tauliers suffisamment respectés pour se faire entendre, ce qui aurait dû n’être qu’une engueulade (l’envahissement du terrain) s’est transformé en violences conjugales.

Les coupables seront rattrapés par la vidéo et les sanctions nécessaires prises. Puis, une fois l’émotion collective évaporée et les bleus résorbés (dans trois jours, donc), on pourra réellement se pencher sur la gravité de l’acte. Et c’est sans doute là que se trouvera le constat le plus malheureux de la soirée. Car ces coups risquent de braquer, à moins de deux mois des vacances, des joueurs déjà soupçonnés de nonchalance.

C’est aussi rendre, pour des jeunes joueurs, son propre stade inhospitalier, alors que c’est probablement à domicile que se jouera le maintien avec les réceptions d’Amiens, Guingamp, Metz et Dijon (pour des déplacements à Monaco, Bordeaux, Marseille, Toulouse et Saint-Étienne). C’est, enfin, ternir inutilement l’image d’un club qui a déjà perdu beaucoup de son identité, de sa direction sportive et de son argent en très peu de temps. Un indice du temps qui passe ? Il y a 24 mois, le dernier envahissement de terrain à Pierre-Mauroy suivait une qualification pour la finale de la Coupe de la Ligue, Rio Mavuba et Benjamin Pavard se disputaient le clappinget Michel Seydoux n’avait pas encore rencontré Gérard Lopez.

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