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Coucke en stock

Par Adrien Candau
Coucke en stock

À la rue en championnat, éliminé de la C1 et même pas reversé en C3, Anderlecht traîne comme un boulet une dette record, qui l'a contraint à se séparer de plusieurs de ses joueurs cadres lors du mercato hivernal. Mais pourra compter dès le premier mars sur son nouveau propriétaire, le milliardaire Marc Coucke, pour se remettre la tête à l'endroit. Du moins, si ce dernier ne se fait pas chiper une bonne partie de sa fortune dans un procès pour fraude.

Il est arrivé, sans se presser. Les cheveux en arrière, lunettes sur le pif et une enveloppe pleine de cash frais dans les mains. Mi-décembre, Marc Coucke déboulait dans la vie du Royal Sporting club d’Anderlecht pour s’offrir 70% du capital du club, moyennant 80 millions d’euros. Ne restait plus aux supporters mauves qu’à attendre le premier mars, date où cet ancien magnat de l’industrie pharmaceutique prendra effectivement la tête du club de Bruxelles. Tirant ainsi un trait sur les 21 années de présidence de Roger Vanden Stock, dont la famille participe étroitement à la gouvernance d’Anderlecht depuis près d’un demi-siècle. Une saga familiale intimement liée au club, mais dont la gestion a semblé en bout de course ces derniers mois.

Mauves pâles

D’abord parce que le club bruxellois est sérieusement à la masse sportivement. Déjà à treize points de Bruges, qui domine de la tête et des épaules le classement de la Jupiler League, les Mauves sont aussi allés droit dans le mur en Coupe d’Europe : en terminant dernier de leur groupe de C1, ils ne se sont même pas offert le droit de disputer la C3. L’exercice 2017-2018 commence même à sentir sérieusement le cramé lors du mercato hivernal. Au lieu de chercher à se renforcer pour éviter de sombrer, le club s’est séparé de certains de ses meilleurs éléments. Exit le capitaine et joueur star, Sofiane Hanni, refourgué pour huit millions d’euros au Spartak Moscou. Exit aussi les deux attaquants Robert Berić et Hamdi Harbaoui. Sans oublier Nicolae Stanciu, un espoir roumain pour lequel les Bruxellois avaient déboursé dix millions d’euros deux ans plus tôt, soit l’achat le plus onéreux de l’histoire du football belge. De quoi crisper l’entraîneur des Mauves, Hein Vanhaezebrouck, qui ne pourra se consoler qu’avec l’obtention du prêt du milieu serbe de Liverpool, Lazar Marković : « Anderlecht a presque dû mendier auprès des autres clubs. »

Fin de règne

Une sortie qui souligne les déboires actuels des Mauves, dont les déceptions sportives sont en partie la conséquence d’une situation financière compliquée. À en croire les médias belges, l’endettement du club aurait doublé en l’espace d’un an, passant de 40 à 81 millions d’euros. De fait, la fin de l’ère Vanden Stock, la famille qui pilote le destin d’Anderlecht depuis plusieurs décennies, semble être caractérisée par une gestion financière un chouia folklorique. La presse belge fait notamment mention d’une augmentation radicale des émoluments des joueurs lors des dernières saisons. Selon elle, les salaires des employés du club représentent même 106% de son budget. Une prise de risque assumée, afin que le club conserve une certaine compétitivité au niveau européen : « C’est dans ce domaine qu’il fallait en priorité investir pour rester sportivement à niveau » , se justifiait ainsi dernièrement Jo Van Biesbroeck, le manager d’Anderlecht. Un pari qui semble finalement se révéler au-dessus des moyens de la formation bruxelloise. La saison dernière, le Sporting n’avait déjà eu d’autre choix que de vendre à tour de bras pour remplir ses caisses, en transférant coup sur coup Tielemans, Praet, Defour et Okaka.

Citizen Coucke

De quoi forcer les Mauves à restreindre leurs dépenses et rééchelonner leur ambitions. Ou peut-être pas. Depuis la fin de l’année 2017, Anderlecht s’est trouvé un sauveur : Marc Coucke. Un type qui pèse très lourd. Précisément 1,16 milliard d’euros selon Forbes, qui a évalué la fortune du bonhomme. Coup de bol, cet ancien propriétaire de l’entreprise pharmaceutique Omega Pharma est un dingue de sport, un vrai. « Sa grande passion, c’est le cyclisme, mais c’est aussi un acharné de football, pose Thomas Peeters, économiste du sport et enseignant à l’International Football Business Institute, à Bruxelles. Il a beaucoup investi à Ostende, un club qu’il détient depuis 2013 et qui jouait habituellement en seconde division. Mais il les a stabilisés pendant ses cinq ans de présidence dans la première partie de tableau de la Jupiler League. »

A priori de bon augure pour les Mauves, dont les soucis financiers sont sans doute passagers. « Disons que le timing de la vente n’était pas idéal, poursuit Thomas Peeters. Coucke ne pourra prendre ses fonctions qu’en mars et n’a donc pas pu investir lors du mercato hivernal. Mais, sur le moyen terme, je ne me fais pas de réels soucis pour le club. » Seule ombre susceptible de noircir le tableau, ce procès qui pend au nez du nouveau proprio et pourrait lui coûter très cher. Il y a trois ans, le businessman avait revendu son entreprise pharmaceutique, Omega Pharma, au groupe américain Perrigo, pour 1,9 milliard de dollars. Une somme que l’acheteur considère désormais comme surévaluée, ce qui lui a valu de porter plainte mi-février auprès d’un comité d’arbitrage. « L’impact que ce procès pourrait avoir sur les finances de Coucke, et, par ricochet, sur celles d’Anderlecht, c’est un peu la seule vraie question qui se pose désormais pour le club » , analyse Thomas Peeters. Les supporters des Mauves vont donc encore devoir patienter avant d’être pleinement rassurés. En espérant que cette plainte made in USA soit à peu près aussi sérieuse qu’une bonne vieille histoire belge.

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Par Adrien Candau

Propos de Thomas Peeters recueillis par AC

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