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Chelsea, la glissade attendue

Par Maxime Brigand
Chelsea, la glissade attendue

Battu pour la première fois de son aventure anglaise samedi, Maurizio Sarri a vu son Chelsea exploser sur des failles vues depuis plusieurs semaines : la gestion des débuts de match, l'absence d'alternative dans les circuits lorsque Jorginho est placé sous silence, la difficulté dans les replis défensifs. Et c'est une nouvelle fois Tottenham qui prend le rôle de chromatographe.

White Hart Lane, le 4 janvier 2017. Après s’être envoyé successivement treize victoires consécutives en Premier League, dont notamment un succès majeur face au Manchester City de Pep Guardiola (1-3), le Chelsea d’Antonio Conte tombe (2-0). En conférence de presse d’après-match, l’Italien tire une conclusion pour le futur : « Ce n’est jamais simple d’affronter Tottenham… » Moins de deux ans plus tard, à Wembley, l’histoire s’est donc répétée et les Spurs ont de nouveau assumé leur fonction de chromatographe. Avant la rencontre, Maurizio Sarri connaissait d’ailleurs la donne : « Je sais que ça sera un match compliqué. On va devoir faire très attention aux pertes de balles dans notre moitié de terrain, car ils sont très dangeureux dans ces situations.(…)Et nous, on a encore du travail, notamment dans les phases défensives… » Un secteur devenu depuis plusieurs semaines un levier de colère dans le vestiaire des Blues et où Chelsea a principalement perdu sa bataille du week-end : sa première défaite de la saison en championnat et la première de Sarri en Angleterre depuis le Community Shield.

L’extinction de l’ampoule Jorginho

Celle-ci, Maurizio Sarri l’a vu venir. « Après cinq minutes, la situation était déjà très claire » , glissera l’ancien coach du Napoli après une rencontre qu’il a purement qualifié de « désastre » . Treize jours après un nul concédé au Bridge face à Everton (0-0), le coach des Blues a décidé samedi de revenir avec les mêmes hommes, histoire d’agiter le curseur réaction de sa troupe : un 4-3-3 classique, avec un milieu Kovačić-Jorginho-Kanté qu’il savait avant d’entrer sur le terrain en future infériorité numérique face à un milieu de Tottenham animé par un milieu en diamant tenu à la base par Eric Dier, boosté par Sissoko et Eriksen et agité par un Dele Alli qui a toujours su répondre présent lors de ses sorties face aux Blues.

Après cinq minutes, la situation était déjà très claire…

Résultat ? Alli a une nouvelle fois éclaté en grand : là où Marco Silva avait placé Richarlison sur Jorginho le 11 novembre dernier, Mauricio Pochettino a décidé d’y scotcher l’international anglais, dont le rôle a été clé et qui aura réussi à éteindre le porte-équilibre des Blues (84,3% de passes réussies, son plus faible taux de la saison ; 51 passes tentées, son deuxième total le plus faible depuis son arrivée en Angleterre derrière le match contre Everton où Sarri l’avait sorti peu après l’heure de jeu). Mieux, Alli est venu ouvrir le score de la tête après huit minutes de jeu sur une phase parfaitement représentative des faiblesses actuelles du Chelsea de Sarri.

Supériorité numérique et réduction du temps

Privé de l’expression de Jorginho, Maurizio Sarri a rapidement compris qu’il n’aurait qu’ « une ou deux secondes pour jouer. Et pour ça, il nous fallait assurer la relation entre les centraux et les latéraux opposés. C’était la seule voie possible parce qu’ils sont arrivés en 4-3-1-2, là où ils jouent normalement en 4-2-3-1 ou en 4-3-3. » Un choix payant de Pochettino qui lui a permis de profiter au maximum de la supériorité des Spurs dans le cœur du jeu, mais aussi de tirer sur les capacités tactiques de Kane. Samedi, le buteur maison a ainsi réussi à foutre en l’air le faible équilibre défensif de Sarri. Le premier but, consécutif à un coup franc d’Eriksen, en a été une première preuve, Harry Kane venant chercher une faute dans les pieds d’un David Luiz aux fraises tout au long de la rencontre. Deux minutes après l’ouverture du score, Heung-min Son a foiré une volée au bout d’un une-deux superbe avec Eriksen, mais le travail de Kane sur l’action, qui a emmené Rudiger sur le côté pour ouvrir un espace dans le dos du défenseur allemand, est brillant. Puis, la séquence suprême : au quart d’heure de jeu, l’attaquant anglais a décroché, laissé libre de toute pression par Rüdiger, et a facilement battu Kepa.

Le naufrage de David Luiz

Ce Tottenham-Chelsea n’a pas été une histoire de systèmes, mais plutôt d’animation, de synchronisation des mouvements : le plan de jeu des Spurs exige une discipline collective irréprochable et lorsqu’il atteint un tel niveau d’annihilation de l’adversaire, il devient difficilement contrôlable. C’est là aussi où Sarri est une différence : le bonhomme ne surprend jamais, se base essentiellement sur le même onze, les mêmes circuits, tout au long d’une saison.

Cela confirme que ce n’est pas une question de noms posés sur une feuille de match, mais une question d’attitude. Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’avec la bonne attitude, on peut rivaliser.

Aujourd’hui, l’Italien connaît les failles de son ensemble, et la réception d’Everton et la défaite samedi face à un concurrent majeur au podium les ont mis en lumière. Depuis plusieurs semaines, Chelsea peine à attaquer ses matchs : samedi, les Blues étaient menés 2-0 après seize minutes de jeu et auraient pu rentrer aux vestiaires avec un ou deux buts de plus dans le sac. Ce qui amène à la capacité de gestion de cette équipe, mais aussi au cas de N’Golo Kanté, une nouvelle fois posé en relayeur ce week-end et qui cherche encore son rôle défensif exact dans un 4-3-3 où il est de toute évidence mal exploité.

Le troisième but des Spurs aura été en partie une conséquence de cette situation, Dele Alli ayant tout le loisir de trouver Son en profondeur – et donc de péter toute la ligne du milieu de Chelsea en une passe –, qui a ensuite profité de la naïveté d’Alonso, mais surtout du repli inexistant de David Luiz. Voilà le « désastre » complet du jour : les Blues ont été coupés en deux et n’auront jamais réussi à répondre techniquement, tactiquement, humainement. « Cela confirme que ce n’est pas une question de noms posés sur une feuille de match, mais une question d’attitude. Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’avec la bonne attitude, on peut rivaliser » , a répondu Pochettino, dont la force aura été de briser la verticalité adverse, après la bataille. Une bonne manière pour lui d’aborder une semaine décisive avec la réception de l’Inter en C1 mercredi et un déplacement à l’Emirates samedi prochain. Pour Sarri, le chantier est encore ouvert : l’heure de tester l’étendue exacte des capacités tactiques de son effectif.

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