Dietmar Hopp, un président voué aux gémonies
Les invectives, les insultes, cela fait trente ans que Dietmar Hopp a appris à vivre avec. Mais cette saison, un cap supplémentaire semble avoir été franchi dans la haine envers le milliardaire allemand, président controversé de Hoffenheim. Après des banderoles implicites et un portrait de l’entrepreneur sous forme de cible brandis par certains ultras du Borussia Mönchengladbach, ce sont leurs homologues du Bayern qui en rajoutent une couche lors d’une
démonstration du Rekordmeister contre le TSG (6-0) fin février. Et cette fois-ci, pas de pincettes :
« Dietmar Hopp est un fils de pute »,
peut-on notamment lire sur l’une des banderoles. Abject dans la forme, le fond du message reste néanmoins largement partagé au sein des ultras de BuLi.
« Il est important d’attirer l’attention, et c’est seulement grâce à cela que nos protestations ont trouvé un écho médiatique », justifiera après coup Torben, un abonné de la Südtribune du Borussia Dortmund, à
So Foot. Leur cible :
« La manière totalement décomplexée avec laquelle Hopp intervient financièrement dans la compétition sportive. » Le message est passé. Mais sera-t-il entendu ?
La BuLi remporte son match contre la pandémie de Covid-19
Deuxième semaine de mars : la Bundesliga, comme tous les autres championnats, est mise en sommeil en raison de la pandémie de Covid-19. Deux mois plus tard, alors que le Big 5 a encore le nez dans le guidon,
la Bundesliga reprend là où elle en était restée. Rapide, efficace, la reprise a été rendue possible par une gestion de crise remarquable et un protocole sanitaire extrêmement strict…
qui ne manque pas de faire grincer des dents outre-Rhin. Matchs à huis clos, interdiction des célébrations de but, port du masque par les entraîneurs et les remplaçants… Si l’Allemagne a servi de modèle aux autres championnats pour amorcer et réussir leur reprise, la Bundesliga pourrait bien avoir créé un dangereux précédent pour la pratique du foot à tout prix dans le futur.
Le Bayern : c’est donc ça une saison de transition ?
Orphelin du duo Franck Ribéry-Arjen Robben, anémique sur le marché des transferts, occupé à préparer la succession du président Uli Höness, le Bayern devait vivre ce qu’on appelle une saison de transition. D’autant qu’entre les tauliers du
Rekordmeister et leur entraîneur Niko Kovač,
ça n’a pas toujours été le grand amour. Dès le 11 novembre, l’entraîneur croate prend ainsi la porte
après une humiliante défaite à Francfort (1-5). Et puis comme par enchantement, il suffit qu’un magicien nommé Hansi Flick arrive aux manettes pour soigner tous les maux du Bayern.
Ancien de la maison, très proche des joueurs et partisan d’une philosophie de jeu offensive collant à l’ADN local, l’ex-adjoint champion du monde avec l’Allemagne en 2014 transforme tout ce qu’il touche en or.
Tandis que Robert Lewandowski termine la saison avec 34 buts et devient le co-meilleur buteur de l’histoire de la BuLi, le phénix Thomas Müller s’offre lui le titre de meilleur passeur de l’histoire du championnat (21 offrandes). Et que dire du fabuleux Joshua Kimmich ou de la révélation Alphonso Davies… Avec un tel socle, il apparaît difficile de mettre un nom sur un vainqueur différent de la prochaine Bundesliga. D’autant qu’avec l’arrivée probable du feu follet Leroy Sané et du petit génie Tanguy Kouassi, voire du virtuose Kai Havertz, le faste devrait suinter de partout la saison prochaine.
Le coin des Français : des rires et des rictus
Comme à l’accoutumée, la Bundesliga fait office d’exutoire pour certains jeunes talents français en échec dans leur club formateur. C’est le cas de Moussa Diaby (Bayer Leverkusen) et Christopher Nkunku (Leipzig), irréguliers, mais brillants par moments. Au rayon des bonnes surprises également, Marcus Thuram (dix buts et huit passes décisives à Gladbach) et
Benjamin Pavard (Bayern) se sont adaptés à une vitesse éclair dans leur nouveau club. Les vieux routiers Alassane Pléa (auteur d’un double-double avec les
Fohlen) et Kingsley Coman ont quant à eux confirmé. En revanche, la destination de rêve peut vite se transformer en cauchemar pour ceux qui prennent le séjour à la légère. Demandez donc à Lucas Hernandez, recrue la plus chère de l’histoire de la BuLi, ce qu’il a pensé de sa première saison au Bayern… Longtemps blessés eux aussi, Corentin Tolisso (Bayern), Jean-Philippe Mateta (Mayence), Dan-Axel Zagadou (Dortmund) et Ibrahima Konaté (Leipzig) ont pataugé dans la semoule, tandis que Dayot Upamecano (Leipzig) a fait beaucoup de choses à l’envers en deuxième partie de saison.
Le Werder Brême joue avec le feu
Préparé pour jouer l’Europe, le géant historique du Werder Brême, doyen de la BuLi et recordman du nombre de saisons disputées dans l’élite, se retrouve rapidement à lutter pour sa survie. Plombé par les blessures,
le club du nord-ouest sombre dans la sinistrose et reste attaché à l’avant-dernière place du classement pendant presque toute la saison… jusqu’à ce
sursaut d’orgueil inespéré lors de la dernière journée contre Cologne (6-1). Les
Grünweissen devront néanmoins en passer par des barrages pour rester dans l’élite. Qu’importe, la dégringolade des
Werderaner s’inscrit dans la longue série des historiques du foot allemand frappés par le déclin. Le FC Cologne, le VfB Stuttgart, le Hambourg SV… Autant de monstres sacrés qui ont connu le choc d’une relégation ces dernières saisons. À qui le tour ? Schalke 04,
comme semblent le prévoir ses propres ultras ? Pour les
Traditionsvereine, il est grand temps de reprendre les choses en main, alors que les honnis RB Leipzig et TSG Hoffenheim continuent leur marche vers les sommets.
Le Borussia Dortmund et autres perdants magnifiques
Avec les
Schwarzgelben, c’est souvent la même rengaine. Même quand ils disposent de diamants qui feraient pâlir d’envie le Bayern (
le recordman de précocité Erling Braut Håland, Achraf Hakimi, Julian Brandt), même quand on les croit capables de claquer dix buts à chaque match, l’étiquette de Poulidor revient leur coller à la peau comme un sparadrap. Ah, qu’est-ce que cela aurait été si Lucien Favre avait promu son 3-4-3 plus tôt, si Jadon Sancho n’avait pas joué les ronchons et si Marco Reus et Thomas Delaney n’avaient pas été abandonnés par leur corps ?
Le RB Leipzig, lui, peut s’en vouloir encore davantage. Champions d’automne avec cinq points d’avance, les Roten Bullen se sont effondrés en deuxième partie de saison malgré un Timo Werner de gala (28 pions), prouvant qu’ils ne sont pas tout à fait prêts à concurrencer le Bayern sur une saison complète. Enfin, le Borussia Mönchengladbach (propulsé en C1) et le Bayer Leverkusen (qui se contentera de la C3) ont confirmé leur montée en puissance. Seules escouades à avoir vaincu le Bayern après novembre, les bébés de Marco Rose et Peter Bosz ont souvent offert des masterclass jouissives en matière de jeu offensif. Ne reste plus qu’à gagner en régularité, et le Bayern pourra faire pipi dans son froc.
L’image de la saison : le genou à terre de Marcus Thuram
25 mai 2020 : George Floyd, un Américain noir, meurt sous le genou d’un policier à Minneapolis, aux États-Unis. Le drame de trop dans un pays marqué par les violences policières chroniques à l’encontre des Noirs. Pour marquer le coup, Marcus Thuram devient cinq jours plus tard le premier footballeur à poser un genou à terre, en hommage au mouvement Black Lives Matter. La veille, le jeune milieu américain de Schalke Weston McKennie avait lui porté un brassard flanqué de l’inscription « Justice pour George ». L’acte de naissance de nombreux hommages à l’échelle des clubs partout en Allemagne et ailleurs (Premier League notamment).