S’abonner au mag
  • Italie
  • Disparition de Carlo Mazzone

Carlo Mazzone, une course vers les étoiles 

Par Eric Maggiori

Carlo Mazzone s’en est allé ce 19 août 2023, à l’âge de 86 ans. Figure mythique du football italien, recordman de présence sur les bancs de Serie A, mentor de Totti et Pirlo, l’homme était un concentré de tout ce que l’Italie possède de meilleur et parfois de pire. Aujourd’hui, ce sont tous les Italiens qui ont perdu leur grand-père préféré. 

Carlo Mazzone, une course vers les étoiles 

S’il ne fallait retenir qu’un moment de la vie de Carlo Mazzone, ce serait sans le moindre doute cet instant de grâce du 30 septembre 2001. Ce jour-là, le bon Carlo, en full jogging, fulmine sur son banc. La raison ? Son équipe de Brescia est menée 1-3 à domicile par l’Atalanta, et les supporters bergamasques venus en nombre ont passé la rencontre à l’insulter et à le chambrer. Alors, quand à la 75e minute, Roberto Baggio réduit l’écart d’une reprise de volée sèche en pivot, Mazzone explose. Retenu par un membre de son staff, il balance des quolibets aux tifosi atalantini, et dans son dialecte romain, leur fait une promesse : « Se famo er 3-3 vengo sotto ‘a curva ». En français : « Si on revient à 3-3, je viens sous votre virage ». Un quart d’heure plus tard, très précisément à la 92e, un défenseur de l’Atalanta dévie dans ses propres filets un coup franc rentrant de Baggio et fait chavirer le stadio Rigamonti. Mazzone ne peut se retenir. Le voilà qui tape un sprint vers le virage des supporters bergamaschi, et qui vient célébrer devant eux, le poing serré. Quasiment amusé par la scénette, monsieur Collina, arbitre de la rencontre, est obligé d’appliquer le règlement et l’exclut, Mazzone répondant à cette sanction par deux bras levés vers ses propres tifosi, qui lui offrent une ovation. Cette course rageuse est un parfait résumé de ce qu’était Carletto Mazzone : un gars passionné, brut de décoffrage, vestige d’un football authentique qui appartient désormais au passé.

<iframe loading="lazy" title="YouTube video player" src="https://www.youtube.com/embed/io2g20rkkxE" width="560" height="315" frameborder="0" allowfullscreen="allowfullscreen"></iframe>

Sur la route de Totti, Baggio et Pirlo

Mais ne résumer Carlo Mazzone qu’à cette scène serait un manque de respect pour son incroyable carrière. Car Mazzone, c’est avant tout un record qui n’est pas près de tomber. Celui du nombre de matchs sur un banc de Serie A : 792. Soit 233 de plus que Luciano Spalletti, coach du Calcio le plus capé en activité.

Romain de naissance et romanista de cœur, Sor Carletto a accompli son rêve en 1993, lorsqu’il a été nommé sur le banc de sa Roma. Une sacrée revanche pour celui qui, en tant que joueur, n’avait pu disputer que deux petits matchs sous les couleurs giallorosse. S’il ne remporte aucun trophée avec la Louve, il va toutefois marquer l’histoire du club en faisant confiance à un petit jeune qui pointe alors le bout de son nez, un certain Francesco Totti. Mazzone voit en lui un futur grand, et n’hésite pas à le titulariser régulièrement malgré ses 18 ans. Totti a d’ailleurs maintes fois répété qu’il devait beaucoup à Mazzone, qu’il considère comme un véritable papa.

Le coach romain a également entretenu un rapport exceptionnel avec Roberto Baggio. À tel point que, quand Baggio accepta de signer à Brescia en 2000, le Codino demanda à ce qu’une clause soit incluse dans son contrat. Celle-ci lui permettrait de rompre immédiatement son contrat si Mazzone venait à quitter Brescia… Ensemble, les deux hommes vont emmener les Rondinelle en finale de Coupe Intertoto (perdue contre le PSG !). Toujours à Brescia, Carletto a croisé la route d’un autre jeune crack italien, Andrea Pirlo, qui jouait alors milieu offensif. Après quelques matchs, Mazzone trouve que Pirlo n’est pas vraiment à sa place sur le front de l’attaque, où évolue alors Baggio. Il décide de le faire reculer au poste de regista, devant la défense. Deux ans plus tard, c’est à ce poste de prédilection que Pirlo remporte la Ligue des champions avec Milan puis, en 2006, la Coupe du monde avec l’Italie. Merci qui ?

Terriblement humain

Comme lors de l’épisode de la course sous le virage de l’Atalanta, Mazzone a toujours été 100% nature. Un peu sauvage, un peu grossier, toujours rustique, terriblement humain. Ses sorties médiatiques étaient du petit lait pour les journalistes. Les réseaux sociaux, s’ils avaient existé à l’époque, auraient certainement explosé chaque week-end. Quelques exemples, comme ça, à la volée, pour raconter en quelques mots ce grand mister :

– On disait souvent de Mazzone qu’il était « le Trapattoni des pauvres ». Ce à quoi il a fini par répondre : « Je suis le Trap des pauvres ? Mes bons amis, c’est l’inverse ; c’est Trapattoni qui est le Mazzone des riches ».

– En 1997-98, il coacha pendant quelques semaines une équipe de Naples à la dérive. Très vite, il jeta l’éponge, et balança ses quatre vérités : « Cette équipe-là, même San Gennaro ne peut pas la sauver. »

– En mai 2000, le hasard du calendrier fait que Mazzone, alors entraîneur de Perugia, a été l’arbitre d’un Scudetto que se disputaient à distance la Juventus et… la Lazio, son ennemie jurée. Et pourtant, Perugia, dixième du classement, a battu la Juventus, offrant le titre de champion aux Laziali. Son commentaire à la fin du match ? « Je m’en contrefous que la Lazio ait gagné le Scudetto. Mon job, c’est de faire gagner mon équipe. J’ai fait mon job. Le reste, c’est des conneries. »

– En 2001, Pep Guardiola rejoint Brescia. Lors des entraînements, le Catalan était toujours très discret, quasiment pudique. Alors, Mazzone tente de le secouer à sa manière : « Eho, Pep, tu ne veux pas te la fermer un peu ? » Guardiola répondit : « Quoi ? Je n’ai rien dit. » Carlo : « Justement, je me fous de toi ! Tu n’as jamais rien à me dire ? Des observations à faire ? » Et visiblement, Pep a apprécié la méthode… En 2009, lorsqu’il remporta la Ligue des champions sur le banc du Barça, il dédia la victoire à « son maestro, Carlo Mazzone ». Plus fort encore : ce samedi 19 août, après la victoire de Manchester City face à Newcastle (1-0), Guardiola s’est pointé en zone mixte avec un t-shirt blanc, sur lequel était imprimée la photo de la course folle de Mazzone sous le virage de l’Atalanta. Ça en dit long sur l’empreinte laissée par Sor Carletto…

 

Par Eric Maggiori

Articles en tendances

Votre avis sur cet article

Les avis de nos lecteurs:

Dernières actus

20
Revivez France-Belgique (2-0)
Revivez France-Belgique (2-0)

Revivez France-Belgique (2-0)

Revivez France-Belgique (2-0)

Nos partenaires

  • Vietnam: le label d'H-BURNS, Phararon de Winter, 51 Black Super, Kakkmaddafakka...
  • #Trashtalk: les vrais coulisses de la NBA.
  • Maillots, équipement, lifestyle - Degaine.
  • Magazine trimestriel de Mode, Culture et Société pour les vrais parents sur les vrais enfants.
  • Pronostic Foot 100% Gratuits ! + de 100 Matchs analysés / semaine

Serie A

AS Roma

Brescia

Andrea Pirlo

Actus J. Guardiola i Sala