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Burgos, les secrets de la forteresse du football espagnol

par Anna Carreau
Burgos, les secrets de la forteresse du football espagnol

Tous les clubs des cinq grands championnats européens, deuxièmes divisions incluses, ont encaissé un but... Tous ? Non ! Un club d'irréductibles à Burgos fait de la résistance et affiche une belle différence de buts à +2, pour deux buts marqués et donc une cage inviolée après huit journées. Prochain challenge ? Alavés, leader de la Liga 2 et auteur de treize buts depuis le début de saison. Un duel que la cité médiévale s’apprête à relever sans trembler.

Le coach nous répète tout le temps : « Le fait de ne pas prendre de but nous rapproche de la victoire. »

Après son sixième match nul 0-0 de la saison le week-end dernier face à la réserve de Villarreal, l’étonnant club de Burgos, capitale provinciale de 170 000 habitants au nord de Madrid, affichait un total de deux buts marqués contre zéro encaissé. Avec pourtant huit journées de Liga 2 jouées. Un record européen, mais aussi espagnol, puisque la dernière équipe ibérique à avoir démarré sa saison sans prendre le moindre but après huit matchs, c’était le Barça en 2014-2015. Si les Burgaleses reçoivent ce samedi Alavés, leader du championnat, rien ne les fera revoir leur copie qui leur a permis de se hisser à la 9e place. « Ce style de jeu est lié à la mentalité du coach, affirme Loïc Badiashile, ancien portier de l’AS Monaco et du Stade rennais arrivé au club cet été. Il nous répète tout le temps : « Le fait de ne pas prendre de but nous rapproche de la victoire. » Il met en place une stratégie basée sur le contre, sur la façon d’utiliser les failles de l’adversaire pour contre-attaquer et les coups de pied arrêtés. » Mais il l’assure, Julián Calero, en poste à Burgos depuis juin 2020, n’est pas un entraîneur « obnubilé par la défense ». Preuve en est, les équipes qu’il aime voir jouer sont l’Atlético de Madrid et le Borussia Dortmund. « Des équipes qui n’ont pas forcément la possession, analyse celui qui vit cette épopée depuis les tribunes, ayant dû être opéré de l’épaule en début de saison. Lui, ça ne l’intéresse pas parce qu’il dit que ce n’est pas ce qui te fait gagner. Il préfère avoir peu d’occasions, mais des occasions franches et bien défendre. »

Le Cholismo n’est pas mort

Alors comment jouer au football quand on ignore le ballon ? Loïc Badiashile dévoile quelques secrets : « Dans la semaine, on fait beaucoup de mise en place, d’analyse vidéo et chaque joueur sait exactement ce qu’il a à faire dans l’organisation. C’est beaucoup plus simple pour défendre, parce que lorsque le ballon arrive, tu sais déjà ce que tu dois faire. » Réputé pour être un club de combattants, « une équipe que les autres n’aiment pas jouer » du propre aveu de son gardien, Burgos n’a jamais eu non plus dans son ADN un style de jeu flamboyant et préfère s’appuyer sur son public pour mettre la pression à l’adversaire. Pour autant, ce ratio but marqué-encaissé n’était pas vraiment dans les plans de Julián Calero, qui ne « s’attendait pas à un tel début de saison » selon son disciple de 24 ans. Si les chiffres minimes ont fait quelque peu parler dans la presse espagnole, le technicien local cherche toujours à renouer avec la victoire, lui qui n’en compte que deux sur des courts 1-0 à domicile en début de saison. « Il n’arrête pas de nous dire qu’il s’en fiche des clean sheets si on gagne derrière, martèle à son tour Loïc Badiashile qui a tout compris des causeries. Le coach préfère penser à notre façon de faire mal aux adversaires. Parce qu’on sait que c’est dur de nous faire mal, mais nous, on ne sait pas faire mal aux gens non plus. »

À Paris, par exemple, tu vois que tout le monde ne défend pas et quand ils prennent des buts, ce n’est pas parce que les défenseurs ou les gardiens sont mauvais. Je pense même qu’ils ont de meilleurs défenseurs que nous, mais c’est que notre équipe sait ce qu’elle a à faire et défend à onze.

Si Burgos est évidemment la meilleure défense du championnat, le club se vante moins d’être également la pire attaque. La faute à qui ? « Ce ne sont pas les attaquants qui sont mauvais ou les défenseurs qui sont très bons, répond immédiatement le Français. Tout le monde défend. À Paris, par exemple, tu vois que tout le monde ne défend pas et quand ils prennent des buts, ce n’est pas parce que les défenseurs ou les gardiens sont mauvais. Je pense même qu’ils ont de meilleurs défenseurs que nous, mais c’est que notre équipe sait ce qu’elle a à faire et défend à onze. Donc c’est beaucoup plus facile. » Devant ce football « régressif » , les supporters locaux prennent pourtant du plaisir et chantent en permanence pour ce club qui les a si souvent habitués à jouer le maintien plutôt que les premières places du championnat. « Tout le monde veut voir des buts, reconnaît en souriant le gardien. Mais tu ne peux pas vraiment critiquer une équipe qui ne perd pas, parce qu’elle n’est pas en danger ! »

Un Burgos à deux visages

Pour les plus intrigués qui pensent se ruer sur YouTube ce week-end pour assister à ce duel au sommet entre Burgos et Alavés, Loïc Badiashile a quelques derniers arguments pour convaincre les plus sceptiques face à cette collection de 0-0 : « Devant un match de Burgos ? À domicile, oui tu prends du plaisir à regarder. Ce n’est pas comme les gens pensent. Si tu ne vois que les résultats, tu te poses des questions. Mais il y a une ambiance qui se crée et c’est plaisant de voir nos matchs. À l’extérieur, en revanche, c’est sûr que c’est au rival de faire le jeu et ça peut paraître un peu plus ennuyeux. » Ça tombe bien, puisque c’est dans l’enfer de l’Estadio Municipal de El Plantío que viendront se frotter Basques et Castillans ce samedi. Le tout sans avoir la pression de la fameuse cage inviolée à conserver ou le record du Barça à faire tomber, un non-sujet en interne si l’on en croit le portier français. En revanche, cette série de huit matchs sans défaite laisse espérer un beau finish aux Hijos del Frío. « Personne ne parle d’un maintien aujourd’hui, il y a une sorte d’effervescence autour de l’équipe, les gens se demandent plutôt si on va réussir à gagner, à obtenir quelque chose », conclut Loïc Badiashile, qui devra tout de même compter sur quelques boulettes de son concurrent José Antonio Caro pour retrouver une place dans la cage.

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par Anna Carreau

Propos de Loïc Badiashile recueillis par AC

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