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Bonucci à Milan, un transfert et des interrogations

Par Éric Maggiori
Bonucci à Milan, un transfert et des interrogations

Leonardo Bonucci est donc sur le point de quitter la Juventus et de signer à l'AC Milan. Un transfert qui semblait impensable il y a encore quelques jours et qui, forcément, suscite des interrogations.

La scène se passe il y a quelques mois. Selon le Corriere dello Sport, qui révèle cette anecdote, Leonardo Bonucci aurait demandé à Gianluigi Buffon de lui remettre le brassard de capitaine une fois le grand Gigi parti à la retraite. Étant donné que Buffon n’arrêtera pas avant la fin de la saison 2017-2018, cette demande de passation de pouvoir semblait signifier que Bonucci se voyait à long terme à la Juventus. Pourtant, ce vendredi 14 juillet, Leonardo Bonucci s’est engagé avec l’AC Milan. Un transfert qui aurait semblé inimaginable il y a encore quelques jours, et qui s’est pourtant concrétisé en à peine 24 heures. Bonucci était courtisé par le City de Guardiola et surtout par le Chelsea d’Antonio Conte. Il a choisi Milan. Avec, évidemment, une énorme question, qui tient en un seul mot : pourquoi ?

42 millions, c’est peu

Difficile, en l’état, de comprendre un tel choix. Bonucci était arrivé à la Juve en 2010. En sept années, il a remporté six Scudetti, trois Coupes d’Italie, trois Supercoupes d’Italie, et a atteint deux fois la finale de la Ligue des champions. Il a composé avec Chiellini, Barzagli et Buffon l’une des arrière-gardes les plus fortes au monde. Après la double confrontation face au Barça, cette saison (3-0, 0-0) et à l’AS Monaco (0-2, 2-1), les médias du monde entier avaient applaudi, considérant que les trois Juventini composaient, ensemble, la meilleure défense du monde. Et tout semblait parti pour durer. Voilà pourquoi cette décision soudaine de quitter Turin est difficilement compréhensible.

Surtout, Bonucci avait l’embarras du choix. Les plus grands clubs européens se bousculaient au portillon pour en faire leur pilier en défense. Des sommes folles avaient été évoquées. 60 millions par ci, 70 par là. Il aurait pu aller se mesurer aux robustes attaquants de Premier League, ou aux feux follets de Liga. Ni l’un ni l’autre. Son choix s’est porté sur l’AC Milan, pour une somme de 42 millions d’euros. Quand on sait que Chelsea a dépensé 35 millions d’euros pour recruter Antonio Rüdiger, que Manchester City vient d’en dépenser 57 pour Walker (!), il y a de quoi s’interroger sur l’opération réalisée par la Juve, pourtant une référence en matière de transferts ces dernières saisons.

Embrouilles avec Allegri, Dybala et Higuaín

Alors, qu’est-ce qui a vraiment poussé Bonucci à quitter une équipe qui règne sans partage en Italie, et dont il était le leader ? Pour beaucoup, la réponse tient, là aussi, en un nom : Massimiliano Allegri. Le conflit entre les deux hommes aurait débuté il y a quatre mois, lors d’un match de Serie A face à Palerme. À la 70e minute, alors que la Juve a déjà sa victoire en poche, Allegri décide de faire sortir Stefano Sturaro. Sauf que Bonucci avait demandé au banc à ce que Marchisio, très fatigué, soit remplacé. Allegri l’a ignoré, le défenseur s’est énervé, le ton est monté jusqu’à ce que le coach hurle : « Mais tais-toi ! Tête de con ! Va te faire foutre ! » Quelques minutes plus tard, Allegri fait finalement sortir Marchisio, mais le mal est déjà fait. À la fin du match, Bonucci rentre aux vestiaires très contrarié et s’embrouille avec son entraîneur. Résultat, quatre jours plus tard, pour le huitième de finale aller de Ligue des champions face au FC Porto, Allegri envoie Bonucci en tribunes pour le punir. C’est le point de rupture de la relation entre les deux hommes.

Par la suite, les rapports redeviennent cordiaux pour le bien de l’équipe. La Juve remporte la Scudetto, la Coupe d’Italie, et tout semble aller mieux. Jusqu’à la finale de Ligue des champions face au Real Madrid, le 3 juin. 1-1 à la mi-temps, les deux équipes font jeu égal. Mais dans les vestiaires, il se passe quelque chose, avec Bonucci en protagoniste. Certains médias italiens font état d’une altercation entre Bonucci et Dybala, le défenseur reprochant à l’Argentin d’avoir pris un carton jaune trop tôt dans le match. On évoque même une petite claque de Bonucci à Dybala. Puis, quelques jours plus tard, le journal Libero en remet une couche, en affirmant que le comportement de Bonucci à la mi-temps a passablement énervé Gonzalo Higuaín. Le buteur argentin aurait même dû être calmé par Chiellini. Et Allegri, dans tout ça ? La situation l’a tellement agacé qu’il a renvoyé son équipe directement sur la pelouse, avec quelques minutes d’avance. On sait comment cette seconde période s’est ensuite terminée.

L’avenir avec Rugani et Caldara

La Juventus a donc dû faire un choix. Allegri ou Bonucci. Elle a choisi le coach capable de l’emmener deux fois en finale de Ligue des champions en trois saisons. Et dit ainsi au revoir à l’un de ses meilleurs éléments. Qui vient, du coup, renforcer une équipe qui passe d’un statut d’outsider à celui de candidat très sérieux au titre. Pas vraiment le genre de stratégie à laquelle nous avait habitués la Juve, elle qui préférait, ces dernières saisons, récupérer les meilleurs joueurs de ses rivales (Higuaín au Napoli, Pjanić à la Roma). Les tifosi sont sous le choc, déçus, énervés, mais force est d’admettre que la Juve s’est rarement plantée ces dernières années et que, si personne ne comprend pourquoi elle fait ça, elle le sait sûrement. L’histoire récente lui a donné raison. Récemment, la Juve s’est séparée de Vidal, Pogba, Pirlo, Tévez, Llorente, Morata… S’est-elle affaiblie pour autant ? Non. Les absences se sont-elles fait sentir ? Non.

De fait, les dirigeants turinois ont pris l’habitude d’avoir toujours un coup d’avance. N’oublions pas que la Vieille Dame compte dans ses rangs Daniele Rugani, considéré comme un futur grand, mais qu’elle vient aussi de recruter Mattia Caldara, monstrueux cette saison avec l’Atalanta et qui est promis à un grand avenir. Les deux vont certainement prendre le pouvoir aux côtés de Giorgio Chiellini, même s’il faudra évidemment du temps avant de retrouver les automatismes que Giorgio avait avec son jumeau Bonucci. À moins que les dirigeants turinois ne se servent des 42 millions d’euros encaissés pour faire venir un autre grand défenseur central. Problème : actuellement, il n’y a pas d’autre Leonardo Bonucci sur le marché.

Par Éric Maggiori

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