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Bleus : des arrières droits en rupture de stock

Par Mathieu Rollinger
Bleus : des arrières droits en rupture de stock

Le remplacement de Léo Dubois, forfait, par Djibril Sidibé, met une nouvelle fois en lumière le manque de solutions au poste de latéral droit derrière l'intouchable Pavard. Une situation qui trouve son explication entre le manque de candidats crédibles, l'équilibre de groupe voulu par Deschamps et un timing parfois farceur.

Didier Deschamps n’est certainement pas un grand dépensier. Dans la vie, peut-être, mais dans son boulot encore moins. Et s’il y a un poste de dépense qui est surveillé un peu plus scrupuleusement que les autres, c’est bien celui de l’arrière droit. Depuis 2012 et lors des 96 rencontres des Bleus qu’il a eu à diriger, seulement cinq hommes ont pu croquer la quasi-totalité du gâteau. En tête, Bacary Sagna (33 sélections) et Benjamin Pavard (23), deux joueurs brillants par leur présentéisme, mais discutés pour leur irrégularité – pour le premier – ou leur légitimité – pour le second. Suit un duo formé par Mathieu Debuchy (18) et Djibril Sidibé (18), où chacun a fourni d’énormes attentes sans jamais pouvoir pleinement les confirmer, laissant notamment une part belle à l’outsider Christophe Jallet (16). L’actuel titulaire, Pavard, a beau jurer qu’il y a « peut-être plus d’ouverture qu’à d’autres postes » , ce n’est pas particulièrement vrai.

Car derrière ce G5, seuls Léo Dubois (3), Anthony Réveillère (2), Sébastien Corchia (1) et Rod Fanni (0) ont été appelés par Deschamps, sans s’y imposer. Et lorsque le Lyonnais, dernier prétendant, a le malheur de déclarer forfait à la suite d’une lésion musculaire à la cuisse, subie lors du derby dimanche dernier, Deschamps préfère assurer en rappelant Djibril Sidibé, ses 31 minutes en Premier League et son absence depuis le mois de mars dernier. Un choix dans la logique de « vécu » et d’ « expérience » du sélectionneur qui ne soulève, si ce n’est un poil de lassitude, plus aucune surprise et si peu de débats. Peut-être parce que la foule ne se bouscule pas au portillon.

On n’a pas de latéral droit, mais des idées

Une pénurie que confirme Jocelyn Angloma, du haut de ses 37 sélections : « C’est vrai que côté gauche, il y a énormément de profils possibles, avec de la qualité, mais côté droit, c’est plus compliqué. On a des joueurs intéressants, mais au bout de deux matchs, ils ne sont pas assez bons aux yeux de l’opinion ou par rapport à ce qu’on leur demande. Mais j’ai l’impression que c’est un peu le cas ailleurs en Europe. » Pas tant que ça, si on se réfère à la profusion de candidats en Angleterre, avec Alexander-Arnold, Trippier, Wan-Bissaka, Walker, Walker-Peters ou encore Maitland-Niles. Pour les Bleus, le latéral capable de mettre le doute dans l’esprit du sélectionneur et concurrencer Pavard peine à émerger. Tout au plus, certains noms restent au stade d’une hype à laquelle Deschamps succombe rarement. « La saison dernière, j’avais bien aimé Kenny Lala, très offensif et tout. Mais défensivement, il montre encore aujourd’hui à Strasbourg que c’est compliqué pour lui, liste Angloma. À un certain moment, je pensais aussi à Bouna Sarr. Quand Garcia l’avait essayé à ce poste, il avait explosé. Après, c’est davantage un ailier. » D’autres CV estampillés Ligue 1 auraient eu le mérite d’être examinés comme ceux de Ruben Aguilar (Monaco), Colin Dagba (PSG et actuellement out), Arnaud Souquet (Montpellier) ou Patrick Burner (Nice). Mais ces joueurs ont deux principaux défauts pour espérer doubler, par exemple, un Sidibé qui a déjà eu sa chance : ne pas avoir prouvé sur la longueur au haut niveau et surtout présenter des caractéristiques offensives.

« Vu ce qu’attend Didier Deschamps de ses latéraux, il faut savoir se projeter, mais avant tout assurer la défense d’un couloir. C’est sa nature, il tient à son assise défensive et estime que ses attaquants et ses milieux ont suffisamment de qualités pour faire la différence devant, analyse l’actuel sélectionneur de la Guadeloupe. Benjamin Pavard apporte cette garantie, puisqu’il a été formé défenseur central. Il a pu s’installer durablement, avec pas mal de réussite. » Une façon de faire à l’opposé de la tendance actuelle, qui pousse les arrières à être toujours plus offensifs. Et si la formule a pour l’instant montré son efficacité, puisque l’équipe de France été sacrée deux fois championne du monde avec un central sur son côté droit, ce serait oublier que ces joueurs de couloir ont aujourd’hui la clé du jeu dans une équipe dominante confrontée à des blocs bas. « Sur des matchs où l’axe est fermé, on a aussi besoin de latéraux qui montent plus que Pavard actuellement. Et à droite, il n’y en a pas beaucoup qui peuvent prétendre à ce rôle-là, déplore Angloma. À gauche, Hernandez mis à part, ils ne sont pas forcément meilleurs défensivement, mais ils ont plus de facilité de débordement et de compréhension du jeu. Je ne sais pas d’où vient cette différence entre les deux côtés. » Avant de résoudre le mystère de l’inégalité entre les latéralités, un autre mérite également le détour au-delà des frontières françaises.

Le four Malcuit

Car la solution pour pallier le forfait de Léo Dubois était peut-être à chercher cette fois en Allemagne, où Nordi Mukiele grandit à Leipzig (malgré son match plus que moyen contre l’OL), mais surtout en Italie, où le Napolitain Kévin Malcuit semble enfin arrivé à 28 ans à maturité. Problème, le lendemain de la liste des 23 Bleus, l’ancien Stéphanois a été convoqué pour la première fois avec le Maroc par le nouveau sélectionneur, Vahid Halilhodžić. Alors que le coach franco-bosnien expliquait que « l’entourage du joueur affirmait qu’il était prêt à jouer pour le Maroc » , Malcuit déclinait l’invitation lundi, en envoyant un message d’excuse. Une volte-face communiquée presque au même moment que le rappel de Sidibé en Bleu. Si les montres n’étaient cette fois pas synchronisées, cette décision le laisse éligible pour le futur, et les pré-convocations qu’il reçoit n’assurent guère un avenir en équipe de France. En tout cas, il a déjà le soutien de Jocelyn Angloma. « Il faudrait peut-être lui donner sa chance, pousse-t-il. Mais Didier a déjà ses joueurs, son groupe, et c’est parfois compliqué de rentrer en équipe de France. » Surtout par la porte du côté.

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Par Mathieu Rollinger

Propos de Jocelyn Angloma recueillis par MR.

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