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Balèze Matuidi

Par Alexandre Doskov, à Istra
Balèze Matuidi

À cause du carton jaune qu'il a pris contre l'Argentine, Blaise Matuidi ne jouera pas le quart de finale de vendredi face à l'Uruguay. Une perte immense pour les Bleus, même si l'ancien Parisien n'a démarré qu'un match du Mondial sur deux et sans jouer à son vrai poste.

La scène est brève, et sur le moment, elle a sans doute échappé à pas mal de spectateurs qui avaient encore des flashs du doublé express de Kylian Mbappé qui défilaient devant leurs yeux. Normal, ça s’est passé moins de cinq minutes après l’inscription du chiffre « 4 » à côté du mot « France » sur le tableau d’affichage de la Kazan Arena. Dégoûtés et nerveux, les Argentins prennent des libertés avec la bienséance et se permettent quelques fautes, à commencer par Otamendi qui semble très agité. Blaise Matuidi accourt sur les lieux du crime, demande avec un brin de véhémence au défenseur de City de se calmer, mais il n’a même pas le temps de se retourner que l’arbitre lui a déjà scotché un carton jaune. Cris, protestations, grands gestes avec les bras, tant pis. Trop tard. Matuidi, déjà averti face au Pérou, est bon pour rater le quart de finale. « Je n’ai pas compris la réaction de l’arbitre » , ronchonnera-t-il après le match, avant de passer à l’autoflagellation : « Là-dessus, je dois aussi savoir faire preuve d’expérience. Là, j’en ai manqué. Ça a été mon défaut. J’ai la sanction qui tombe. Voilà, c’est comme ça. » Les Bleus vont devoir faire sans leur marathonien au prochain tour. Étrange enchaînement d’évènements pour celui qui a connu le début du tournoi sur le banc, avant de retrouver sa place de titulaire, mais pas à son poste habituel, et qui a fini par devenir le premier Bleu à prendre deux cartons jaunes lors de ce Mondial russe.

Ce que personne n’ose dire

Deschamps trouvera vite une solution au problème en piochant parmi Tolisso, Fekir, Lemar ou encore Nzonzi pour le remplacer contre l’Uruguay. Et le bon côté de la chose, c’est que le milieu de la Juve reste l’un des piliers de l’équipe même quand il est hors du terrain. Comme Giroud, Matuidi fait partie de cette catégorie de joueurs supposément non adaptés au football de vitesse et de technique, et qui ne sont pas les bienvenus à la fête quand le sélectionneur tente des folies comme face à l’Australie. Mais quand il met son Blaisou sur le banc, Deschamps dit « à bientôt » au joueur sans sacrifier le grand frère. Ce qu’aucun joueur de l’équipe de France ne nie. « Blaise, c’est un leader » , annonce Pavard. « Blaise, c’est un patron » , renchérit Pogba.

Et après le match décevant contre les Australiens, c’est bel et bien l’ancien Parisien qui avait déboulé en conférence de presse pour taper du poing sur la table et dire ce que personne n’avait osé dire jusqu’à présent : « On voit que la Coupe du monde, c’est facile pour personne. On a une belle équipe, mais ça ne suffit pas forcément. La vérité, elle est sur le carré vert. Le talent c’est super, c’est très bien, mais ça ne suffit pas forcément. Il faut en avoir conscience. » Évidemment, personne n’avait osé contester sa légitimité en lui expliquant qu’il avait à peine participé à la rencontre, vu qu’il était entré à la 78e minute. Pour résumer, Matuidi est un des seuls joueurs de l’effectif à pouvoir gueuler « La vérité, elle est sur le carré vert » tout en ayant à peine foulé le carré vert en question, et en étant écouté malgré tout.

Sans le ballon

De toute manière, quand il est sur la pelouse, ce n’est pas là où Matuidi fait l’unanimité. Loin de là. On vient même lui chercher des noises parce que Deschamps persiste à le faire jouer sur l’aile gauche dans un 4-2-3-1 qui n’est pas fait pour lui. En passant au confessionnal, Olivier Giroud confirmait ce que tout le monde avait déjà remarqué : « Blaise, il n’a pas l’habitude d’évoluer à ce poste-là et la percussion n’est pas sa qualité première. » Avant d’envoyer une grande tape dans le dos de son pote : « Mais il a eu un gros volume de jeu, et il a compensé les chevauchées de Lucas. » Il faut revoir le match face au Pérou pour le comprendre, et avoir ce chiffre en tête : en moyenne, un footballeur passe à peine plus d’une minute balle au pied par match. Tout le reste, c’est du jeu sans le ballon. Un domaine dans lequel Matuidi a excellé à Iekaterinbourg. Et sans lui sur le terrain, le scénario aurait pu être bien moins heureux pour les Bleus, même si Matuidi n’a pas été bon quand le ballon est passé par lui.

Quant au match contre l’Argentine, il devrait dissuader n’importe qui de critiquer l’apport offensif du bonhomme puisqu’il envoie l’avant-dernière passe sur le deuxième et le quatrième but. Alors oui, devoir faire sans lui pour un quart de finale qui s’annonce aussi rugueux que celui face à l’Uruguay est une perte énorme pour les Bleus. Mais être un patron, ce n’est pas seulement se rendre indispensable. C’est aussi faire confiance à ses collègues. « On est un groupe, c’est pour ça qu’on est 23. Ils vont faire le job pour qu’on puisse passer en demies » , a promis Matuidi il y a quelques jours. La différence entre un chef et un chefaillon.

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Par Alexandre Doskov, à Istra

Propos recueillis par AD

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