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Ahmed Yahiaoui, mais non

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Ahmed Yahiaoui, mais non

Dans un univers parallèle issu de Football Manager ou de son ancêtre Championship, ils ont été des cracks : buteur industriel, muraille infranchissable, artiste ultra-créatif... La réalité a été moins tendre pour eux. Dans cette funeste caste, Ahmed Yahiaoui, ancienne belle promesse marseillaise et contemporain de Samir Nasri.

Il fait partie des fameuses perles. Ces joueurs qu’on recrute dès le début d’une partie ou qu’on fait monter en équipe première dès les premiers entraînements. Sauf que dans la réalité, le tempérament bouillant du Ahmed Yahiaoui lui a valu une carrière bien moins glorieuse que son talent en tant que milieu de terrain ne laissait présager.

Pilier des U17 champion d’Europe 2004

Né en 1987, Ahmed Yahiaoui aurait dû être l’un des leaders de l’équipe de France de football, au même titre que ses compères de promotion Samir Nasri, Karim Benzema, Hatem Ben Arfa ou encore Jérémy Ménez. Mais à l’image de toute cette génération dorée, championne d’Europe U17 en 2004, la carrière du minot marseillais n’a pas répondu aux attentes qu’elle suscitait. « Il était largement du même calibre si ce n’est au-dessus des autres (ndlr : Benzema, Nasri…), car il avait un temps d’avance physiquement. Il était porté vers l’avant dans un rôle de relayeur, à l’aise techniquement et avec un gros coffre physique. C’était un superbe joueur » , se souvient Salah Nasri, oncle de Samir et aujourd’hui conseiller d’Ahmed Yahiaoui.

Formé à l’Olympique de Marseille, Yahiaoui est considéré en 2004 comme l’un des deux joyaux du club avec Samir Nasri. Mais si ce dernier prend progressivement place dans le onze phocéen, Yahiaoui se contente de jouer les utilités – premier match de Ligue 1 en janvier 2005 – malgré la signature lui aussi de son premier contrat pro en début de saison. Quand le meneur de jeu se voit rapidement affublé du surnom de Petit Prince en raison de sa technique raffinée, le milieu défensif, lui, s’illustre plus par ses coups de sang, comme une expulsion suivie d’une crise de nerfs et de convulsions en avril, lors d’un match de la réserve marseillaise contre Le Pontet. Annoncé dans le viseur de Chelsea et promis aux plus beaux honneurs, Ahmed Yahiaoui veut aller vite, à tel point qu’il décide de quitter l’OM en août 2005 malgré la possibilité de s’y inscrire dans la durée.

La rupture avec l’OM, la première erreur

Pour Salah Nasri, il s’agit là du premier tournant de sa carrière, et de sa première erreur : « Il désirait avoir l’assurance d’un temps de jeu conséquent, mais sinon, il était à l’aise à l’OM, et pour un premier contrat, il était bien financièrement pour son âge. Il n’en a pas fait une question d’argent. Il était jeune, il avait largement le temps de prouver et personne ne doutait qu’il allait s’imposer à l’OM, mais il a été impatient et peut-être pas très bien conseillé à cette époque. » S’il était resté à Marseille, son destin aurait été différent, « c’est une évidence, même l’équipe de France semblait une évidence quand il était à l’OM » , se souvient Salah Nasri. Débute alors le cahoteux parcours d’Ahmed Yahiaoui : Istres (2005-2006), Sion (2006-2007) puis Cannes (2007-2008). À chaque fois, l’histoire tourne court, voire termine mal, comme lorsque Sion le licencie début 2007 pour être parti soigner une pubalgie en France et avoir malencontreusement oublié de revenir.

« C’est une personne entière, c’est sûr. Il a aussi fait des erreurs dans le déroulement de sa carrière et ses choix, il ne faut pas se cacher derrière sa sensibilité. Il a manqué d’autorité parentale peut-être, ou de la présence d’un grand frère » tente d’analyser Salah Nasri. Suite à son départ de Cannes en mai 2008, l’ancien grand espoir du football français disparaît même du circuit professionnel, à seulement 21 ans. Il ne réapparaît sur les écrans radars qu’à l’été 2011, lorsqu’il rejoint le GS Consolat tout juste promu en CFA. « Mentalement, il était au plus bas, il avait arrêté le football, il n’avait pas de travail. Il était en dedans même s’il n’était pas déprimé, bien dans ses baskets » raconte Jean-Luc Mingallon, président du club marseillais. En amateurs, l’ancien grand espoir se rachète une image et trouve un entourage qui le comprend : « Ahmed Yahiaoui via les rumeurs, je n’en ai pas entendu que du bien : une mauvaise personne, un garçon arrogant… À travers son passage à Consolat, moi je trouve que c’est un super garçon, quelqu’un de bien. Il était toujours un petit peu canaille, il rigolait, il avait toujours le sourire, et cela m’a plu. En plus, physiquement, il était très bon » , se remémore Mingallon.

Ahmed Yahiaoui, trop beau et trop gentil

Pour le dirigeant du Consolat, ce n’est pas un manque de maturité qui a freiné le joueur – relancé en Ligue 2 à Sedan dès l’été 2012 – mais plutôt sa sociabilité : « Son problème, ce n’est pas le manque de maturité, c’est sa beauté. On en rigolait dans le vestiaire : il plaît aux femmes, il plaît aux filles, il était tout le temps sollicité pour ça, pour aller faire la fête. Il est gentil, beau garçon et serviable, c’est plutôt ça qui l’a un peu détourné. » Pour Mingallon, si Yahiaoui veut un futur footballistique, il doit forcément se le construire hors de l’Hexagone, « tout quitter » . « Partir au Qatar, aux États-Unis, là où il y a vraiment des cloisons pour protéger le sportif. Ahmed son problème, c’est que quand il était dans la galère il n’avait plus beaucoup d’amis. Il a fallu qu’il sorte un tout petit peu de la galère et il a à nouveau plein d’amis. Je ne dis pas que tous ses amis sont néfastes, il ne faut pas écrire ça dans votre article, mais voilà, certains l’entraînent un petit peu en dehors des terrains. » Et pourtant, à 27 ans et si l’on en croit son entourage, le joueur a encore le coffre pour rendre service à un club professionnel. Salah Nasri : « Aujourd’hui, il a toujours une condition physique de malade, il est bien entraîné. Son football, il ne l’a pas perdu. Il peut jouer dans une bonne Ligue 1. Aucun club n’est venu vers lui parce qu’il est oubliettes et il a une petite réputation qui le suit. Je pense qu’il va bientôt rebondir dans un club amateur, et une fois qu’il le fera, j’espère que des clubs pros le suivront et le jugeront sur ce qu’il fait sur le terrain et non sur ses erreurs de jeunesse. »

Pour Jean-Luc Mingallon, le temps joue contre son ancien protégé, qui doit se hâter pour rebondir ou préparer l’après : « Ahmed, il peut la redresser, sa carrière. De toute façon, il va le falloir, ça c’est sûr. Il ne peut pas continuer comme ça, c’est pas un garçon qui pourra aller travailler à l’usine. C’est même pas un garçon que vous allez faire travailler à la ville de Marseille. Il n’a jamais été programmé pour ça. C’est ça le problème qu’il va avoir dans sa vie. Plus le temps passe et plus il fait son œuvre, il doit préparer l’après-football. » Une carrière avec un goût d’inachevé dont l’homme a conscience, si l’on se fie au président Mingallon : « C’est un garçon qui a une petite tête de canaille, qui est charmeur, qui est intéressant. On pense qu’il n’a rien dans la tête mais quand on discute avec lui… Il sait qu’il est passé à côté de quelque chose, il en est conscient. » À 27 ans, il lui reste une toute dernière chance, mais pour cela, il lui faut déjà trouver un nouveau point de chute.

Ahmed Yahiaoui Né le 12 janvier 1987 à Marseille
Milieu de terrainInternational français U18

Clubs successifs :Olympique de Marseille (1994-2005), Istres (2005-2006), Sion (2006-2007), Cannes (2007-2008), Consolat (2011-2012), Sedan (2012-2013), MC Oran (2013)

Palmarès :Champion d’Europe U17 en 2004

==> À lire : Portrait de José de la Cuesta, un des meilleurs défenseurs de Football Manager

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