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40 bougies pour Ronaldo – Partie 2

Par Gaspard Manet, Éric Maggiori, Arthur Jeanne, Maxime Brigand, Alexandre Pedro, Ruben Curiel
40 bougies pour Ronaldo – Partie 2

À l'occasion des quarante ans de Ronaldo, quarante personnalités du foot (joueurs, entraîneurs, commentateurs) nous ont parlé de leur souvenirs du Fenomeno. De son ancien coéquipier à l'Inter Benoît Cauet à Alessandro Nesta, en passant par Pascal Feindouno, Jean-Alain Boumsong et Olivier Dacourt. Deuxième partie, les vingt derniers.

21. Alessandro Nesta

Ancien défenseur

« Pour moi, Ronaldo a été l’attaquant le plus fort de tous. La première année en Italie… (il soupire) J’ai joué contre lui en finale de la Coupe UEFA à Paris, en 1998, je n’ai jamais vu un joueur jouer aussi bien une rencontre de football. Cela a peut-être duré peu, parce qu’après il s’est brisé le genou, mais selon moi, c’était vraiment le plus fort. Je mets Messi derrière lui, c’est aussi un phénomène. Les autres attaquants, tu peux toujours comprendre ce qu’ils vont faire. Mais ces deux là sont imprévisibles. Ce que la plupart des gens font en état statique, eux ils le font en pleine course, à 200 km/h. Ce sont des martiens. »


22. Pascal Feindouno

Footballeur

« Ronaldo, c’est LA star. Pour tous les footballeurs, c’est une icône. Il a fait beaucoup de grandes choses dans sa carrière, c’est un monsieur à respecter. J’adore ce mec, vraiment. Je ne vais même pas parler de sa façon de jouer, c’est un magicien, ça, tout le monde le sait. Du coup, pour changer un peu, je vais te dire que j’admirais énormément son calme sur le terrain, même quand il prenait des coups, il ne disait jamais rien. Et puis, il sourit tout le temps, ça montre qu’il aimait ce qu’il faisait. Un peu comme moi ? Oui, voilà (rires). Quand tu le vois avec un ballon, ça te donne envie de jouer direct. C’est vraiment un exemple à suivre. Pour tout le monde. Il restera à jamais parmi les grands. »


23. Sidney Govou

Ancien international français

« Le football moderne, c’est lui. Il a inventé tout ce qui ce fait dans le football aujourd’hui. Pour moi, il y a un avant et un après Ronaldo.

Ça a été le premier à réunir toutes les qualités : physique, technique, athlétique. Beaucoup de grands joueurs d’aujourd’hui, c’est du Ronaldo copier/coller, mais en moins bien. Ça reste le plus fort. Je l’ai l’affronté en 2006, avec le Brésil, mais c’était différent, ce n’était plus tout à fait le même Ronaldo, il avait un peu perdu, il jouait différemment. Moi, je garde surtout le souvenir du Ronaldo de Barcelone ou de l’Inter, celui qui faisait absolument tout ce qu’il voulait. Tu le voyais jouer, tu te disais juste : « Wouha » . Ce que j’aimais chez lui, c’était sa conduite de balle super efficace.

T’avais l’impression que les mecs à côté de lui jouaient au ralenti.

T’avais l’impression que les mecs à côté de lui jouaient au ralenti. C’était un vrai joueur de foot. Tout simplement. Tu ne savais jamais ce qu’il allait faire, même lui je ne suis pas sûr qu’il réfléchissait avant à ce qu’il allait faire, il composait avec ce qu’il avait en face de lui, pas avec ce qu’on lui avait appris. C’était tout à l’instinct. »


24. Lionel Charbonnier

Ancien international français

« Déjà, pour moi, il n’y a qu’un Ronaldo, et c’est lui. Le premier. Celui qu’on connaît actuellement est un excellent joueur, mais je regrette qu’il ait le même nom, car le Brésilien était quelqu’un d’unique. Et il restera d’ailleurs unique dans les annales du football. J’ai le souvenir d’un match amical qu’on avait fait avec Auxerre face à l’Inter. Il était entré à vingt minutes de la fin, et là, sur une balle en profondeur, il se retrouve à l’angle des six mètres, côté droit. Franck Silvestre va à sa rencontre, donc je ne sors pas, et on se retrouve tous à l’arrêt, sur nos appuis, prêts à réagir.

Pour moi, il n’y a qu’un Ronaldo, et c’est lui. Le premier. Il restera d’ailleurs unique dans les annales du football.

Mais quelques millièmes de seconde plus tard, bizarrement, j’entends un brouhaha dans les tribunes avec tous les supporters qui criaient de joie. Sur le coup, je ne comprends pas, mais quand je regarde au fond des filets, la balle était bien là. Franck se retourne vers moi et me dit : « T’as vu quelque chose, toi ? » « Bah non et toi ? » « Non ! » Comme c’était un match amical, on n’a jamais pu revoir les images, du coup je ne saurai jamais ce qu’il a fait ce jour-là. »


25. Pascal Cygan

Ancien footballeur

« Un des meilleurs joueurs de l’époque, évidemment. Un très grand buteur. Là comme ça, je me souviens de cette finale de 98, ce qui ne doit pas être un bon souvenir pour lui. Si le match aurait été différent avec un Ronaldo au top ? Forcément, ça aurait été plus difficile, oui, après Desailly et Lebœuf ont fait une très grande finale, tout comme l’équipe de France dans son ensemble et quand tu gagnes 3-0, ce n’est pas un joueur qui change tout. Personnellement, je n’ai pas le souvenir de l’avoir eu au marquage, même si on s’est peut-être croisé en Espagne, quand j’étais à Villarreal. Mais je n’ai pas besoin de l’avoir joué pour savoir qu’un joueur aussi habile et aussi rapide est un véritable cauchemar pour les défenseurs. »


26. Jean-Alain Boumsong

Ancien international français et consultant beIN Sports

« Un phénomène. Un des meilleurs joueurs de l’histoire. Extraordinaire. Le vrai joueur fuoriclasse, comme disent les Italiens. J’ai joué contre lui une fois à l’occasion du centenaire de la FIFA, en 2004, lors d’un France-Brésil.

Bon, ce jour-là, il n’avait pas fait un très grand match, ce n’était sans doute pas une rencontre qui lui tenait à cœur, mais malgré ça, tu sentais qu’à tout moment, il pouvait faire quelque chose d’incroyable. Un peu comme un senior qui joue contre des cadets. Il avait une petite forme de nonchalance, sauf que quand il décide d’accélérer, tu ne peux plus rien faire. Tu peux arriver à gagner un duel de temps en temps face à lui, mais la plupart du temps il faut s’y mettre à deux ou à trois.

Tu peux arriver à gagner un duel de temps en temps face à lui, mais la plupart du temps, il faut s’y mettre à deux ou à trois.

Le laps de temps entre sa prise de décision et sa mise en exécution est si bref que tu n’as pas le temps de comprendre. Il fait partie de ces joueurs tellement instinctifs qu’ils ne peuvent pas expliquer ce qu’ils font. D’ailleurs, à l’image de Maradona, ce sont des joueurs qui ont parfois du mal à devenir entraîneur, car pour eux, tout est tellement inné qu’ils ont du mal à transmettre, à expliquer aux autres. C’est souvent le cas pour les vrais artistes, les virtuoses. »


27. Bruno Derrien

Ancien arbitre international

« Je garde l’image de la finale 2002 où il marque un doublé quatre ans après celle de 1998 où il n’aura été que l’ombre de lui-même. Une revanche, en quelque sorte. En tant qu’ancien arbitre, même si je n’ai jamais eu la chance de l’arbitrer, je garde aussi l’image d’un joueur très gentil, pas belliqueux, jamais dans les coups fourrés. Son jeu faisait qu’il était marqué de près par les défenseurs, qu’il était souvent victime de fautes, mais pour autant il ne se rebellait pas. Jamais un mot plus haut que l’autre envers le corps arbitral. Quelqu’un de très correct en plus d’être un joueur extraordinaire. »


28. Olivier Dacourt

Ancien international français et consultant Canal +

« Il Fenomeno ! Il a révolutionné le football. Rien de moins.

Je l’ai affronté plusieurs fois dont une fois en Coupe d’Europe avec Strasbourg, alors qu’il était à l’Inter, ce jour-là, nous, on était à 400% et on avait réussi à gagner le match, mais lui, tu sentais qu’il était tranquille, qu’il ne forçait pas. Derrière, j’ai eu l’occasion de jouer d’autres fois contre lui, notamment pour son retour à Milan, sous le maillot de l’AC Milan, je jouais alors à l’Inter, il joue contre nous pour son premier match et il marque un but, même si on avait réussi à gagner 2-1. À chaque fois que je l’ai rencontré, il est exactement comme on peut l’imaginer, sympathique, agréable. Un grand monsieur, sur comme en dehors du terrain.

J’avais trouvé ça touchant, lorsque Zlatan avait joué contre lui pour la première fois, et qu’il l’avait regardé de façon admirative. Ce n’est pas vraiment le genre d’Ibra d’être en admiration devant quelqu’un.

Il y a une image que j’avais trouvé touchante, c’est lorsque Zlatan joue contre lui pour la première fois, tu le vois le regarder de façon tellement admirative, et ce n’est pas vraiment le genre d’Ibra d’être en admiration devant quelqu’un, mais là, il était devant son idole de jeunesse. Sinon, la dernière fois que je l’ai vu jouer, c’était lors d’un match en Autriche, pour la fondation Figo. Ça devait être il y a trois-quatre ans, il avait déjà pris pas mal de poids, et bah, il est entré juste cinq minutes, il a mis un double petit pont et une frappe enroulée sur la barre, comme ça, directement. Et derrière, il est sorti sous les ovations du stade. Une légende. »


29. Roby Langers

Ancien international luxembourgeois

« C’était un joueur hors normes. Le genre de joueur qui sait tout faire. C’est quand même très rare de voir des joueurs avec une telle qualité de dribbles, surtout qu’il était également un excellent buteur. Je n’ai pas une image de lui précise en tête, mais je me rappelle qu’il affectionnait particulièrement le double contact, la virgule, qu’il réalisait à merveille. Je pense que c’est l’un des très grands de l’histoire du football. Il a clairement marqué son époque, en tout cas. »


30. Benoît Cauet

Ancien coéquipier de Ronaldo à l’Inter

« J’estime avoir eu la chance de côtoyer le meilleur joueur du monde au meilleur moment de sa carrière.

C’était un joueur hors du commun, il avait des qualités footballistiques, que ce soit en vitesse ou en puissance, que je n’avais jamais vues chez personne avant lui. Le surnom « Il Fenomeno » était vraiment parfait pour lui. J’ai vraiment eu la chance dans ma carrière de jouer avec de grands joueurs, de grands internationaux, mais c’est vrai que lui avait quelque chose en plus que tous les autres. En plus, c’était une personne adorable à tous points de vue, il avait toujours envie de s’amuser, de rigoler.

J’ai vraiment eu la chance de jouer avec de grands joueurs, mais lui avait quelque chose en plus que tous les autres.

Il était à l’aise avec les gens et se montrait disponible avec tout le monde, toujours avec le sourire. Si je ne dois retenir qu’un seul match, c’est forcément cette finale de Coupe de l’UEFA, à Paris, face à la Lazio où il a alors confirmé qu’il était bien le meilleur joueur du monde. Sur ce match, il a tout fait, surtout qu’en face de lui, il avait un défenseur qui est devenu l’un des meilleurs au monde par la suite, mais ce soir-là, il n’y a pas vraiment eu match. »


31. Jérémie Bréchet

Footballeur

« Il a inventé tellement de choses incroyables en matière de dribbles. Ce qu’il faisait, c’était du jamais-vu, sur le dribble en lui-même déjà, mais surtout à la vitesse à laquelle il l’exécutait. Ce qui est assez impressionnant quand tu regardes bien ses vidéos, c’est que le haut de son corps ne bouge pas vraiment, ses jambes étaient tellement puissantes qu’elles faisaient tout, en fait. J’ai eu l’occasion de jouer contre lui, lors d’un Real Madrid-Real Sociedad. Eh bien, c’est simple, on avait perdu le match 2-0 et c’est lui qui avait mis les deux buts. Après, ce n’était déjà plus le Ronaldo de l’époque avec les chevauchées folles et tout ça, là il avait mis deux buts facile, un duel contre le gardien et un but dégueulasse en réception de centre. Terminé, bonsoir (rires). Moi, j’ai toujours été fan du mec, ce qu’il a fait pour le football, c’est fantastique. Et puis sa carrière repose sur une certaine dramaturgie avec la crise d’épilepsie, les blessures au genou, le retour en 2002 ; bref, autant de choses qui ont contribué au mythe Ronaldo. »


32. Gerardo Tocino

Président du plus grand groupe de supporters du Real, La gran familia

« En août 2002, je discutais avec Florentino Pérez, que je connais bien, et je lui dis : « Président, il nous faut un grand attaquant, c’est ce qui nous manque actuellement, un mec pour terminer. J’ai repéré un petit jeune qui va être un grand, il s’appelle David Villa, il joue au Sporting Gijón. » Et là, Florentino me dit : « Ne t’inquiète pas, on vient de faire signer Ronaldo ! » Putain, j’étais comme un fou. Il venait d’être champion du monde avec le Brésil et puis c’était Ronaldo, quoi. Il Fenomeno ! Premier match, il entre, boom, quinze secondes plus tard, reprise de volée : but. Extraordinaire. Et quinze minutes plus tard, rebelote. Sur cette première saison, il a été exceptionnel, il finit à trente buts. Un des plus grands que nous ayons eus. »


33. Michel Denisot

Président d’honneur de Châteauroux et ancien président du PSG

« Je me souviens l’avoir invité au festival de Cannes, en 1999, on avait même monté les marches ensemble.

En fait, je connaissais bien Leonardo que j’avais fait venir au PSG quand j’étais président du club, et avec qui j’avais gardé de bons rapports. J’allais d’ailleurs régulièrement le voir à Milan. Et il se trouve que dans son immeuble milanais, son voisin de palier était Ronaldo. Les deux étaient proches, avec Leo qui jouait un peu le rôle de grand frère, du pilote. Et comme, à cette époque-là, je m’occupais des cérémonies à Cannes, j’avais décidé de les inviter tous les deux. Et on peut dire que ce n’était pas passé inaperçu. On sait toutes les possibilités qu’offrent les nuits cannoises, et ils en avaient donc profité pour faire un peu la fête, sauf qu’entre les différents lieux, ils étaient obligés de se déplacer escortés par les flics, ce n’est que comme ça qu’ils pouvaient s’en sortir. Un traitement digne des plus grandes célébrités américaines.

On sait toutes les possibilités qu’offrent les nuits cannoises. Leonardo et Ronaldo en avaient donc profité pour faire un peu la fête, sauf qu’entre les différents lieux, ils étaient obligés de se déplacer escortés par les flics.

Pour la petite histoire, quand on monte les marches, c’est pour aller voir un film, bien entendu, sauf que là, évidemment, on y est allé en fonction de leur emploi du temps et non du film en lui-même, du coup on s’est retrouvé à la projection d’un film des pays de l’Est, et disons que Ronaldo s’est légèrement assoupi durant la séance (rires). L’autre souvenir que je garde de lui est peu moins bon, puisqu’il s’agit d’une défaite sportive. Si on gagne la Coupe d’Europe des vainqueurs de coupe en 1996, ça aurait fait deux succès de suite dans cette compétition, chose qu’Ibrahimović ne sait sûrement pas. Et on perd cette finale face à Barcelone avec justement un but de Ronaldo sur penalty. Un penalty qu’il est bien allé chercher. Il n’a pas simulé, hein, mais il a fait ce qu’il fallait pour l’obtenir (rires). »


34. Jacques Vendroux

Ancien journaliste sportif

« J’ai connu Ronaldo grâce à Gérard Saillant, qui avait notamment soigné son genou au début des années 2000.

Il m’a dit que Ronaldo était un mec absolument adorable, bien élevé, qui respectait ses séjours à la Salpêtrière. C’était un homme sain, même s’il aimait bien faire la fête, et qui avait un respect de la nature humaine incroyable. Lors de ses séjours à la Salpêtrière, il prenait des nouvelles des infirmières, il avait laissé des cadeaux, des maillots. C’est quelqu’un dont Saillant parle avec beaucoup d’admiration, les Brésiliens sont en général très respectueux de la vie. Sur un terrain, c’était le meilleur.

Il souriait toujours, même après une action ratée, il regardait le public et lui souriait.

Sa finale de Coupe de l’UEFA contre la Lazio est sa référence. Mais au-delà de ses qualités footballistiques, Ronaldo, c’est surtout un sourire. Il souriait toujours, même après une action ratée, il regardait le public et lui souriait. C’était quelque chose d’extrêmement communicatif. »


35. Vampeta

Ancien footballeur et ami proche de Ronaldo

« J’ai un paquet d’histoires avec Ronaldo, mais une marrante, c’est la fois, où je l’ai surpris en train de dîner seul avec cinq mannequins. Je suis allé vers lui et je lui ai demandé : « Dis-moi lesquelles sont des femmes, lesquelles sont des travestis.«  »


36. Laurent Robert

Ancien international français

« Quel buteur d’exception ! C’est bien simple tout le monde avait peur de lui. Le mec était tellement inarrêtable, c’était un danger permanent.

J’ai eu l’occasion de jouer contre lui en Ligue des champions, et le mec était fidèle à l’image que je m’en faisais : un très grand professionnel doté d’une immense gentillesse. Sur le terrain, c’est quelqu’un qui se comportait toujours correctement, jamais un mauvais geste, jamais de mauvaises paroles. Pas le genre non plus à s’énerver et aller mettre un tacle bête. Et pourtant, il en prenait des coups, lui.

C’est un joueur qui savait se servir de tout son corps, il jouait avec les bras, les fesses, tout, il savait tout utiliser pour faire la différence.

Évidemment, je garde en tête son but avec Barcelone où il traverse tout le terrain, tranquillement, sans se soucier des défenseurs. Ce but illustre bien toutes ses qualités : vitesse, changement de rythme, accélération, puissance et finesse technique. C’est un joueur qui savait se servir de tout son corps, il jouait avec les bras, les fesses, tout, il savait tout utiliser pour faire la différence. Si c’est l’un des plus grands de l’histoire ? Évidemment. »


37. Frédéric Mendy

Ancien footballeur

« Je me rappelle très bien d’avoir joué contre lui, puisque c’était un match amical entre Bastia et l’Inter lorsqu’il revenait tout juste de blessure.

Il me semble même que c’est le premier match qu’il dispute depuis près d’un an et demi, quelque chose comme ça. Et bah sur le terrain, tu n’aurais pas dit que le mec revenait de convalescence, hein. C’est bien simple, il nous a collé trois buts. Et je me souviens qu’il en met un magnifique. Il reçoit la balle aux 25 mètres, là il enchaîne deux feintes de frappe pour mettre dans le vent deux défenseurs avant de faire une feinte de corps devant le gardien et de marquer dans le but vide. Incroyable. Et le mec revenait juste de blessure, c’est juste fou. Nous forcément, au début, on n’osait pas trop le toucher, même nos dirigeants nous avaient dit : « Si l’un de vous le blesse, ça va le suivre à vie ! »

J’avais échangé mon maillot avec lui. Je ne sais pas s’il a gardé le mien, mais en tout cas, moi, j’ai toujours le sien chez moi.

Mais très vite, pendant le match, lui nous faisait comprendre que c’était bon, qu’on pouvait jouer normalement. Et pour la petite histoire, j’ai même réussi à récupérer son maillot à la fin du match. J’avais demandé à Antar Yahia qui jouait alors à l’Inter d’aller lui demander si ça ne le dérangeait pas d’échanger son maillot avec moi, le mec a accepté sans problème, très gentiment. Je ne sais pas s’il a gardé le mien, mais en tout cas, moi, j’ai toujours le sien chez moi (rires). »


38. Fernando Vázquez Pena

Entraîneur de Compostelle en 1996

« Je me souviens parfaitement de cette action. Elle était longue, j’ai eu le temps d’avoir des sensations différentes. D’abord, j’ai eu l’impression que le premier défenseur allait l’arrêter, peu importe la manière.

Ronaldo trébuche, le défenseur l’accroche même par le maillot. Mais bon, il arrive à s’en défaire et en quelques secondes, il est déjà à une dizaine de mètres. Tactiquement, j’avais préparé le match pour le bloquer. Ma ligne de quatre défenseurs était bien haute, justement pour pouvoir anticiper ce genre d’actions. Quand tu regardes le début de l’action, tu ne peux pas imaginer que ça va terminer en but, tu te dis que, forcément, il va se faire découper. Il était si loin du but… Et quand il commence son slalom, j’ai ressenti une énorme frustration, parce qu’en quelques dribbles, il a anéanti le travail d’une semaine entière. Je n’ai même pas pu gueuler sur mes joueurs pendant cette action, j’étais sous le choc.

Quand tu regardes le début de l’action, tu ne peux pas imaginer que ça va terminer en but, tu te dis que, forcément, il va se faire découper. Il était si loin du but…

Quand il a commencé son slalom, là j’ai compris que ça pouvait aller au bout. Et je me souviens, quand il marque, je me suis tourné vers le banc du Barça. À cette époque (en 1996, ndlr), il y avait Bobby Robson et Mourinho. Et l’entraîneur anglais avait les mains sur la tête, il ne croyait pas ce qu’il venait de voir. Je n’ai pas pu montrer la même forme d’admiration parce que j’étais dans le camp d’en face, mais j’aurais pu réagir exactement comme lui. Après le match, j’ai entendu mes joueurs parler dans le vestiaire. Mais le pire, c’est la réaction de José María Caneda, le président du club à l’époque. Il est venu me voir et il m’a dit qu’il avait honte. Que les défenseurs ressemblaient à des marionnettes sur le but, qu’on ne pouvait pas marquer un tel but face à des professionnels. Je lui ai simplement répondu que grâce ou à cause de ce but, l’équipe de Compostelle allait entrer dans l’histoire. La preuve aujourd’hui. Évidemment, c’est humiliant de prendre un but comme ça. Mais t’es obligé d’être admiratif. Surtout quand tu vois la carrière de Ronaldo ensuite. On ne s’est pas pris ce but par n’importe quel joueur. C’est le plus grand joueur que j’ai vu de mes propres yeux. C’était une fusée. Une fois qu’il était lancé, c’était fini. »


39. Jean-Michel Larqué

Ancien international français et consultant RMC

« J’étais admiratif de ses face-à-face avec les gardiens. Là où généralement le gardien en gagne sept sur dix, face à Ronaldo le ratio tombait à un duel remporté sur dix pour les portiers.

C’était remarquable. De ce que je connais du football, il me paraît évident que l’on peut le mettre au rang des plus grands joueurs de l’histoire. Après, c’est toujours délicat d’élaborer une hiérarchie précise, je ne sais pas s’il est dans les dix ou quinze meilleurs de tous les temps, toujours est-il qu’il fait partie du rang des plus grands. C’est un joueur exceptionnel, et on se souviendra de lui pendant encore longtemps au même titre que, plus tard, on n’oubliera pas des joueurs comme Messi ou Cristiano Ronaldo. Surtout qu’il est toujours plus facile de se souvenir des joueurs offensifs que des grands défenseurs. On a toujours une tendresse particulière pour les attaquants, c’est comme ça. Une image que je garde en tête, c’est évidemment cette finale de la Coupe du monde 2002 où il fait gagner son équipe à lui tout seul, alors que quelques mois auparavant on pensait qu’il ne serait pas au niveau. Je m’en souviens d’autant que c’est le match où je m’engueule avec Thierry. J’ai eu la chance de le rencontrer une fois lors d’un déjeuner organisé par Florentino Pérez à Madrid.

Ronaldo avait un sacré coup de fourchette, je me souviens qu’il avait mangé des quantités impressionnantes de petites asperges salées. Des saladiers. Avec Di Stéfano, ils se faisaient presque un concours.

Un repas où il n’y avait que des légendes : Zizou, Ronaldo, Di Stéfano, Butragueño. Je peux vous dire que je me sentais tout petit au milieu de tous ces grands noms. Et on va dire que Ronaldo profitait plutôt bien de la table (rires). Il avait un sacré coup de fourchette, je me souviens qu’il avait mangé des quantités impressionnantes de petites asperges salées. Des saladiers. Avec Di Stéfano, ils se faisaient presque un concours. En tout cas, l’homme est fidèle à l’image qu’il renvoie, à savoir quelqu’un de très gentil, qui est loin de se la jouer. Il était très respectueux des anciens et très agréable avec tout le monde, même avec les gens les plus modestes dont je faisais partie (rires). »


40. Jonathan Zebina

Ancien international français

« Quand vous me dites Ronaldo, je pense « au vrai » comme on dit souvent. C’est une mauvaise comparaison quand on dit « le vrai« , car c’est comme s’il y avait un deuxième mec qui s’appelait Jordan au basket.

Je pense que quand on dit « le vrai« , c’est parce que les gens de ma génération, c’est celui qu’on a connu, celui contre qui on a joué. Là où il est « le vrai« , c’est que c’est ce genre de personnage qui a changé son sport comme Tiger Woods a changé le golf et comme Jordan a changé le basket. Il a rendu notre sport beaucoup plus rapide, il l’a fait passer dans une autre ère. Il n’a peut-être pas inventé le passement de jambes, mais c’est lui qui l’a poussé à son paroxysme en le réalisant en pleine course. Il a proposé des gestes que l’on n’avait jamais vus avant.

Il a proposé des gestes que l’on n’avait jamais vus avant. C’est un peu lui qui a lancé la mode des joueurs de Playstation, rapides et techniques.

C’est un peu lui qui a lancé la mode des joueurs de Playstation, rapides et techniques. En fait, il a lancé le football contemporain, c’est pour ça que l’on dit « le vrai » , selon moi. Cristiano Ronaldo aujourd’hui, en un contre un, c’est très compliqué de l’arrêter, mais malgré son nombre de buts, ça a l’air possible. Ronaldo, c’était impossible de l’arrêter. Il avait presque une décennie d’avance. On avait l’impression que l’on n’était pas assez entraînés, pas assez rapides pour jouer contre lui. »

Dans cet article :
Dans cet article :

Par Gaspard Manet, Éric Maggiori, Arthur Jeanne, Maxime Brigand, Alexandre Pedro, Ruben Curiel

Tous propos recueillis par Gaspard Manet, sauf ceux de Nesta par Éric Maggiori, de Tocino par Arthur Jeanne, de Vendroux par Maxime Brigand, de Vampeta par Alexandre Pedro, de Pena par Ruben Curiel

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