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  • Les 0-0 qui ont marqué l'histoire

0-0 mémorables (1er) : Pays-Bas-Italie, une histoire de penaltys

Par Éric Maggiori

Qui a dit que les matchs nuls sans but étaient forcément ennuyeux ou inutiles, voire les deux ? Voici cinquante raisons de penser le contraire, avec des rencontres privées de tremblement de filet qui ont pourtant marqué l'histoire du football. Numéro un : la demi-finale de l'Euro 2000 entre les Pays-Bas et l'Italie, évidemment.

#1 - Pays-Bas-Italie, 2000

Pays-Bas – Italie

Euro, Demi-finales, 29 juin 2000

Il y a des jours, comme ça, où l’histoire n’est pas de votre côté. Vous avez beau essayer, rien n’y fait. Une puissance qui dépasse les limites du réel vous empêche d’avancer, vous empêche de gagner. C’est ce qui est arrivé aux joueurs néerlandais en cette fin du mois de juin 2000. Un jour qui aurait dû leur sourire, qui aurait dû consacrer une équipe nationale qui se dirigeait tout droit vers le titre et qui, finalement, s’est révélé être l’un des jours les plus maudits de l’histoire des Pays-Bas. Et Dieu sait qu’en football, il y en a eu, des jours maudits pour les Néerlandais. Le 29 juin, c’est la demi-finale de l’Euro 2000. Les Pays-Bas, co-organisateurs de l’évènement, accueillent l’Italie à Amsterdam. Les Hollandais ont réalisé un début d’Euro parfait, avec quatre victoires sur quatre matchs, dont un succès de prestige face à l’équipe de France, championne du monde en titre, lors de la phase de poules. Les Italiens, de leur côté, ne sont pas en reste, avec un même total de quatre succès en quatre rencontres, même si leur parcours a été résolument plus facile. Les deux équipes ont l’air solide, mais, avec le soutien de tout un peuple, la Hollande semble destinée à la finale. Au coup d’envoi, à 18h, personne ne se doute encore que le match qui s’apprête à avoir lieu sur la pelouse de l’Arena va être épique.

Toldo et ses poteaux

Dès le début de la rencontre, les Pays-Bas mettent une énorme pression sur les Italiens, qui reculent immédiatement dans leur moitié de terrain. On retrouve dans cette équipe folle les frères de Boer, Seedorf, Overmars, Kluivert, Van der Sar ou Bergkamp, soit la génération Ajax 1993-1995. L’Italie est tellement acculée qu’elle est contrainte de commettre des fautes. Dans le premier quart d’heure, Zambrotta et Iuliano, deux défenseurs, récoltent chacun un carton jaune, preuve de la fébrilité des Azzurri. En revanche, les Pays-Bas sont dans leur match. Sur son premier ballon dangereux, Bergkamp expédie une fusée sur le poteau de Toldo, tout content de voir ce ballon ne pas rentrer dans ses filets. Quelque part, ce poteau est un signe prémonitoire. Mais ça, personne ne le sait encore. Car la réalité de ce début de match est tout autre : la Hollande asphyxie l’Italie, qui va se retrouver encore plus dans la panade à la 37e minute de jeu. Zambrotta, déjà averti, commet une jolie faute sur un intenable Zenden. Deuxième jaune, carton rouge. L’Italie est à 10. Le naufrage semble inévitable.

D’autant que quelques minute plus tard, l’arbitre concède un penalty aux locaux pour une faute de Nesta sur Kluivert. De Boer se présente face à Toldo. Mais le portier est un fin stratège. « L’arbitre favorisait les Hollandais parce qu’ils auraient voulu une finale France-Hollande, c’est évident. Lors du match précédent, De Boer avait tiré un penalty à la droite du gardien. Je me suis donc dit : « Il va penser que j’ai vu cette vidéo, et il va donc me tromper en tirant de l’autre côté. » J’ai donc décidé de plonger de l’autre côté, à gauche.  » Malin. De fait, Toldo détourne le penalty de De Boer. On en reste à 0-0. Mais les problèmes de l’Italie sont loin d’être résolus. En seconde période, avec un joueur en moins, Zoff, le sélectionneur azzurro, est obligé de demander à Del Piero de venir donner un coup de main en défense. Les offensives néerlandaises continuent, et Iuliano commet une nouvelle faute dans la surface, cette fois-ci sur Davids. Le défenseur de la Juve échappe au deuxième jaune, mais pas au penalty. Changement de tireur. C’est Kluivert qui s’y colle. Cette fois-ci, Toldo est pris à contre-pied, mais le tir de l’ancien de l’AC Milan vient s’écraser sur le poteau. 0-0, encore et toujours.

La Panenka de Totti

Les minutes s’écoulent, et la Hollande, écœurée par ses occasions ratées, arrive de moins en moins à faire trembler les Italiens. La Nazionale commence même à prendre courage et à tenter des choses. Zoff, audacieux, fait entrer les deux Romains Delvecchio et Totti, qui se créent d’ailleurs une occasion dans les dernières minutes. Rien à faire, prolongation. Une prolongation où les crampes et la fatigue prennent le pas sur le reste, même si les Azzurri se créent une dernière opportunité par Delvecchio, dont le tir est détourné en corner par Van der Sar. Il faut passer par l’épreuve des tirs au but. Une épreuve qui ne laisse pas forcément de bons souvenirs aux deux formations. Lors de la dernière Coupe du monde, en 1998, l’Italie a été éliminée aux tirs au but par la France, et les Pays-Bas ont subi le même sort face au Brésil. Mais après les 120 minutes qui venaient de s’écouler, il semble que plus rien ne pouvait arriver à l’Italie. Une pensée confirmée dès le premier tir au but. C’est Di Biagio qui s’y colle. Deux ans plus tôt, c’est justement son tir qui s’était écrasé sur la barre, causant l’élimination de l’Italie. Cette fois-ci, le Romain ne flanche pas, et transforme. Derrière, c’est à nouveau De Boer qui vient défier Toldo.

Le capitaine hollandais frappe pour la deuxième fois à gauche, le gardien de la Fiorentina plonge encore du bon côté et repousse. La folie. Puis Pessoto marque. S’avance alors Jaap Stam. Le défenseur de Manchester United envoie une fusée sur la lune. Italie 2, Hollande 0, et quatrième penalty raté par les Néerlandais dans cette rencontre. Sur son banc, l’expression de Frank Rijkaard, le sélectionneur des Pays-Bas, en dit long. Il a compris que ce match n’était pas pour lui. Mais il reste encore un geste pour écrire définitivement l’histoire. Et ce geste, c’est Totti qui va le réaliser. « Il est parti pour aller tirer, il s’est tourné vers nous, et en romain, il a dit : « Mo’ je faccio er’ cucchiaio (je vais lui faire une panenka). » On s’est tous regardés et on s’est dit : « Pourvu qu’il plaisante. »  » Non, Totti ne plaisante pas. Du haut de ses 23 ans, il s’en va tromper Van der Sar d’une splendide panenka, qui envoie pratiquement l’Italie en finale. Les tirs suivants sont anecdotiques. Kluivert marque (enfin !), Maldini rate, mais Toldo, héros du jour, repousse la dernière tentative de Bosvelt. L’Italie s’impose 3-1 et s’envole en finale. Une finale où le destin avait, visiblement, décidé de changer de camp.


Pays-Bas (4-2-3-1) : Van der Sur – Bosvelt, Stam, F. De Boer (c), Van Bronckhorst – P. Cocu (A. Winter, 95e), E. Davids – M. Overmars, Bergkamp (Seedorf, 86e), Zenden (Val Vossen, 77e) – P. Kluivert. Sélectionneur : Frank Rijkaard.

Italie (3-4-1-2) : Toldo – Iuliano, F. Cannavaro, Nesta – Zambrotta, Albertini, L. Di Bagio, P. Maldini (c) – Fiore (Totti, 83e) – Del Piero, F. Inzaghi (Delvecchio, 67e). Sélectionneur : Dino Zoff.

Par Éric Maggiori

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